
La journée commence plutôt bien. Je me lève tôt, me dirige vers mon tapis de yoga et pratique. La séance est à ma portée. Je me sens tonique, forte et apaisée. Dès le réveil, se sont des sentiments qui donnent de la confiance pour affronter toutes les épreuves dont le quotidien regorge. Je suis déterminée et j’en ai bien conscience.
Mon programme est le suivant. Je dois me rendre en ville, pour faire quelques courses. Alors, je prépare quelques tartines au beurre, simples. Avec le pain de la veille. Rien que pour ça, je suis heureuse de m’être levée. Ma tisane se termine presque par magie, tellement j’avais soif. Le corps plein d’énergie, c’est ainsi que j’affronte l’extérieur. Mes pas sont sûrs et j’avance vers mon objectifs. La ville grouille. Il y a beaucoup d’informations qui arrivent. Entre les gens qui pressent le pas, qu’il faut éviter, le boucan de la route qui m’empêche de penser. Mais je ne faiblis pas. Une fois arrivée au magasin, je trouve aisément ce dont j’ai besoin. Pendant ce temps, mon carburant s’épuise. Mais ça, je ne le vois pas.
Je paie mes articles et je peux m’estimer chanceuse car pour rentrer chez moi, un proche vient me chercher. Néanmoins, je dois marcher avec mon pactole jusqu’au point de rendez-vous.
Arrivée à la maison, je prends doucement conscience que mon réservoir est percé. Ce n’est pas toujours évident de savoir où se trouve la limite. Elle a tendance à varier de jour en jour. M’étant levée du bon pied, je n’ai pas vu les ressources diminuer, surtout aussi vite. Je tente de ne pas en vouloir à ce corps qui me porte. Je prends le temps d’écouter ce qu’il a me dire. Il m’explique qu’il est fatigué, que c’est finalement pas une si bonne journée que ça pour lui. Je le remercie d’avoir tenu jusqu’au magasin et lui propose de prendre soin de lui. Il ose me montrer ses faiblesses et ses difficultés pour que je puisse m’adapter. Ça ne va pas être simple mais je vais faire mon possible pour lui offrir le confort et le repos qu’il requiert. Nous sommes une équipe, envers et contre tout. Je ne le lâcherais pas.
Il est midi et je dois me nourrir. Je sors un truc rapide, le réchauffe et vais m’installer pour manger. La dernière bouchée avalée, je ressens que les choses se corsent. J’ai envie de dormir. Enfin non, j’ai besoin de dormir. Mon corps a besoin de ne plus bouger. Dans ma tête, c’est contradictoire. Mon corps requiert l’inertie la plus totale pendant que ma tête, elle, a envie de bouger. Je tente d’attraper mon ordinateur pour pouvoir écrire un peu, m’évader.
Ça ne dure pas cinq minutes. C’est un échec. Mon enveloppe me rappelle que je dois aller dans son sens. Oups, je suis têtue, j’avais déjà oublié ou plutôt, je tentais de grappiller quelques minutes de plus. Alors cette fois, j’accepte. J’accepte par contrainte. Mes bras se sont alourdis. Chacun d’entre eux pèsent plus que le poids de mon corps entier. Dans mes jambes, ça tape. Dans ma tête, c’est flou.
Je m’endors.
Le réveil est compliqué, cette fois-ci. J’ai failli oublier, j’ai un rendez-vous de physiothérapie. Je ne me sens pas capable de m’y rendre mais avec l’aide, encore, de mes proches, j’y parviens.
C’est une personne douce qui prend le temps d’écouter ce que je tente de lui expliquer, sur ce que je ressens physiquement. Elle ne remet pas en cause mes douleurs, elle tente de comprendre. Elle va poser ces doigts sur cette enveloppe charnelle et va tenter, de toute sa bienveillance et de son professionnalisme de m’apporter du réconfort physique. Elle me transmet, par la même occasion, son énergie positive. Elle rattache ensemble tous mes morceaux pour que peut-être, la fin de cette journée soit plus supportable. Je l’en remercie et en sortant de chez elle, rien n’est résolu mais j’ai définitivement gagné une batterie éphémère.
En arrivant à la maison, je sais que l’horloge tourne et que bientôt, je serais à nouveau complètement écrasée par le poids de mes douleurs. J’enfile des habits confortables et m’installe dans le canapé, avec à porté de moi, tout ce dont je pourrais avoir besoin ou envie. Je suis prête à passer la tempête, à l’abri.
Lorsque l’orage commence, mes proches sont là pour me soutenir. Ils m’enveloppent dans les couvertures, me font sourire comme ils peuvent. Ils tentent de rendre ce moment plus confortable et de me changer les idées. Je me sens recouverte d’amour et elle me protège. Les douleurs restent physiques et n’arrivent pas à accéder à mon moral. Peut-importe s’il n’est pas agréable de devoir recourir à leur aide, j’accepte. Je lâche prise. J’admets que j’en ai besoin et que m’entêter pour me débrouiller ne fait qu’aggraver la situation. Intérieurement, je me promets de toujours leur renvoyer l’appareil, d’une manière ou d’une autre. Rien que par la gratitude de les avoir, c’est un premier pas de le reconnaître. Je sais qu’ils n’attendent rien, mais je ne peux m’en empêcher. Avec eux, j’oublie tout ce que je ne peux pas faire. Je garde l’espoir d’avoir d’autres opportunités, plus tard.
Ce soir-là, un repas m’est servi. Ce soir-là, je suis accompagnée dans mes faits et gestes. Ce soir-là, c’est un soir comme ça.
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