Depuis l’annonce officielle de mon syndrome, plusieurs choses ont changé en moi. C’est tellement compliqué à admettre, à assimiler et à expliquer que je ne sais pas comment l’écrire. J’essaie de trouver la formulation idéale qui embellira ce que je ressens. Je vais tenter d’être honnête avec vous, avec moi. Vous êtes le prétexte par lequel je passe pour comprendre et digérer ce que je vis. Ok, bon, il faut que je cesse de tourner autour du pot. Je me lance.
Je me sens vide.
J’ai mis tellement d’énergie pour trouver d’où venaient mes problèmes, de les légitimer et maintenant que c’est posé, je n’ai plus de raisons de me lever. C’est aussi simple et déprimant que ça.
C’est étrange pour moi de vous dire ça. En temps normal, je suis si positive. Depuis le diagnostique, je ressens ce manque d’énergie. À la fois, j’ai envie d’avancer avec ce que je sais désormais et à la fois, je suis coincée. Je ressens que ce quotidien n’est définitivement pas adapté à mes difficultés et pour y remédier, il faut entamer une reconversion professionnelle, il faut des démarches, des financements, du travail et de l’énergie. Et c’est ce dernier point qui m’ennuie. J’ai l’impression que le corps arriverait à suivre mais pas la tête. Elle est fatigué. Le combat l’a achevé. C’est peut-être ça, une dépression. Avant, je n’avais plus la force physique d’accomplir des choses et dès maintenant, c’est la force psychique qu’il me manque. Alors peut-être que crier à la dépression, c’est peut-être un peu rapide. C’est peut-être qu’une passade désagréable de plus.
J’avais un but jusqu’ici. J’avançais avec l’objectif de prendre soin de moi et de trouver des explications à mon état. J’étais indulgente envers mes limites et malgré tout, je ne reculais devant rien. J’entreprenais toujours tout un tas de choses en dépit de mon état. J’ai terminé ma quête et je constate que je n’avais pas préparé l’après.
Après le diagnostique, lorsque ça ne se guérit pas, il reste quoi à faire?
J’ai tourné et retourné la question, consciemment, inconsciemment.
Je crois que je dois trouver une nouvelle raison d’avancer. J’ai besoin d’un nouveau moteur et c’est pas les idées qui viennent à manquer. Actuellement, j’ai toujours la tête pleine de projets mais j’ai l’impression d’être convaincue par aucun d’entre eux. Je n’arrive pas à décider ce qui sera le mieux pour moi. J’ai peur d’échouer. Alors je n’entame rien. Je reste ensuite frustrée de cette inertie.
Et puis j’ai peur de faire les mauvais choix. En choisissant cette profession, je n’avais aucune idée de l’avenir qui m’attendait et pourtant, j’ai la sensation d’avoir failli. Je m’en voudrais presque d’avoir mal choisi et pourtant, j’ai conscience de ne pas être coupable. Mais tout de même, la culpabilité d’avoir fait le mauvais choix me touche.
En dehors de la peur d’échouer, il y a la peur de devoir capituler. Il est aussi possible que je n’ose pas entamer un projet par trouille de devoir l’abandonner à cause de mon état. Finalement, c’est peut-être ça le nœud du problème. Je ne sais pas où sont les nouvelles limites de ce corps. Je ne me connais plus. Je ne me reconnais plus. J’ai mis plus d’une vingtaine d’année à apprendre à me connaître, à savoir que j’avais du potentiel. Et finalement, là, je retourne à mon adolescence. Je retourne aux doutes vis-à-vis de l’avenir. La pression de devoir refaire un choix d’avenir qui soit le bon pour un temps. J’ai conscience que ce que je choisirais professionnellement n’est à nouveau pas pour ma vie entière mais si après si peu d’année de travail, je retourne déjà à la case départ, qu’est-ce qui empêche la vie de me faire tout recommencer dans cinq ou sept ans? Personne n’a de garantie sur la vie et je le sais bien mais actuellement, l’épuisement de la maladie me fait voir la vie et ses épreuves comme une chaîne de montagne inaccessible.
J’ai abandonné avec regrets plusieurs aspects de ma vie, de mes habitudes et de mes plaisirs. Je pense l’avoir accepté que ma vie sera différente. Je suis désormais dans une bulle où je tente de me préserver de nouvelles déceptions. Forcément, je tente d’éviter les coups de bâton. Et finalement cette bulle devient ma prison. Je n’ose pas entreprendre. Je n’ose pas en sortir. Je m’étais pourtant promise de vivre chaque jours en célébrant les petites victoires et les actes réussis tout en fermant les yeux sur le reste. Quand ai-je laissé ce leitmotiv de côté?
J’ai enfin une bonne nouvelle! J’ai pris des jours et des jours à éviter de voir toutes ces peurs en face mais maintenant que j’en ai conscience, sachant que la peur n’évite pas le danger, je me dois d’avancer avec. Avec mes peurs, avec mon syndrome.
Il n’est jamais trop tard. Maintenant que j’ai pu observer mon moral sur la mauvaise pente, il est temps pour moi d’agir. D’entreprendre une vraie célébration à ma jolie vie et m’offrir à nouveau ce plaisir de vivre. Avoir peur, ce n’est vraiment pas habituel pour moi, alors il ne faut pas que ça devienne une habitude. Il me faut des rituels hebdomadaires, du repos lorsque cela est nécessaire et surtout, il faut que je me jette à l’eau! J’adore me baigner, c’est l’occasion rêvée de faire d’une pierre deux coups!
J’en ai toutes les capacités. Il faut que je me le prouve à nouveau. En ayant ce nouveau statut de personne atteinte de sa santé, j’ai l’impression d’avoir moins de valeurs qu’une personne saine. Merci la société et le vocabulaire utilisé autour de ces thématiques. Je dois me lancer dans un projet pour me prouver que je peux le faire, que je peux y arriver et surtout que les capacités sont présentes, c’est juste à moi d’y croire. Elles attendent juste mon aval.
Et c’est ainsi, sur ces mots que j’ai créé le blog sur lequel vous lisez mes péripéties. Pour ceux qui n’aurait pas suivi les débuts de celui-ci, j’ai documenté pendant plus de trois mois, mes journées, mes petites joies quotidiennes. J’ai cultivé le bonheur comme je ne l’avais jamais fait auparavant et ça a véritablement été ma bouée de sauvetage. J’ai osé tout un tas de choses dont je ne me saurais pas cru capable et petit à petit, j’ai appris à vivre avec mon syndrome, avec ses hauts et ses bas. Mais surtout, le plus important, j’ai retrouvé une raison d’avancer. J’ai appris à vivre pour moi.
Fin
Merci encore de me lire, j’espère que ça t’a plu. N’hésite pas à me donner ton avis! Prends soin de toi, c’est important!
La confrère mandatée par mon médecin est spécialiste en immunologie. Elle a vu mes résultats sanguins de février dernier mais selon elle, c’est très vague et il faut encore faire des recherches. Elle me propose à chaque rendez-vous un nouveau test. Des prises de sang spécifiques qui ne faisait rien d’autres que de vider mes ressources. J’avais tellement l’habitude de n’avoir aucun résultats probants. Elle me proposa encore un énième examen. Une biopsie des glandes salivaires. Elle m’avait vendu ça comme étant peu invasif, simple et rapide. J’avais accepté, comme toujours. Cela devait se passer avec un autre spécialiste.
Le jour de l’analyse, le médecin avait procédé à l’anesthésie de ma lèvre inférieure par une jolie aiguille. Puis, il fit une incision et retira quelques précieuses glandes salivaires. Pour terminer en beauté, deux points de suture et hop j’étais dehors. J’avais prévu d’aller travailler juste après, comme mon immunologue m’avait dit que c’était une intervention bénigne, je n’avais pas imaginé la suite ainsi.
J’étais dehors du cabinet et je sentais mon corps défaillir. J’étais blanche et ma tension était basse durant la première heure, sûrement à cause du sang perdu. J’ai tenté de boire un soda mais avec une lèvre complètement endormie et gonflée, c’était compliqué. Je suis arrivée au travail avec cette nouvelle bouche botoxée et l’impossibilité de formuler plus d’un mot à la minute. Heureusement, je portais un masque et personne ne pouvait voir ma tête en dessous! Lorsque l’anesthésie s’est estompée, le véritable calvaire à commencer. J’ai dû abandonner mon poste, encore une fois.
Cela m’a coûté une semaine de difficultés à parler, à sourire et à manger. C’était une difficulté courte mais dont je me serais passée, je vous assure! Et surtout vu mon état d’esprit paradoxal. D’un côté, j’étais convaincue que le résultat serait nul et de l’autre, j’étais remontée de devoir passer par des épreuves comme celle-ci et je me disais qu’il y avait intérêt que ça donne quelque chose cette fois!
J’attendais à la fois tout et rien de cet épisode là, c’était aberrant.
La délivrance du résultat était attendue au prochains rendez-vous avec la spécialiste qui avait supervisé l’intervention. Je devais compter quatorze jours. Je l’ai fait les trois premiers jours puis j’ai oublié.
Une semaine après l’intervention, je devais me rendre au cabinet pour enlever les fils des points de suture, avec l’autre médecin.
C’est à ce moment-là, qu’il décida de lancer dans les airs qu’il avait vu des résultats positifs passer. Je me suis empressée de lui demander de préciser mais il m’expliqua qu’il n’était pas l’instigateur de cet analyse et que je devrais attendre de voir ma spécialiste.
J’ai pris cette nouvelle comme une claque inattendue. Je dois admettre qu’on s’attend rarement à en recevoir une. Bon bref, je ne m’y attendais pas. Je m’attendais juste à enlever ces foutus points dans ma bouche.
Je suis sortie de ce rendez-vous assommée. Positif? Positif de quoi? Comment? J’avais énormément de questions en tête et la sensation de toucher un truc que j’avais tellement espérer que j’avais fini par abandonner.
Et c’était là, à portée de main, sans que je puisse le toucher.
J’ai dû prendre mon mal en patience durant une semaine. Sept journées. Cent soixante-huit heures. Je vous l’accorde, c’est très court en comparaison aux longs mois de souffrance que je venais de passer. À cet instant, ça m’a pourtant parut être sans fin.
J’étais entre l’euphorie d’arriver au bout de mes recherches et la peur de cette découverte. J’avais envie de voir en gardant les yeux fermés.
Le jour « J » est arrivée. Et cette fois, j’étais pressée. Je savais que j’allais avoir des réponses. C’est du moins ce que je croyais.
Je peux ajouter à mon palmarès médical, le syndrome de Sjögren. Je vous laisse galérer pour le prononcer, il n’y a pas de raisons que j’endure ça toute seule.
Je vais essayer de vous expliquer le plus simplement possible. C’est une maladie auto-immune c’est-à-dire que mes cellules se détraquent et s’attaquent à elles-même. Comme dans beaucoup de pathologie, elle varie d’une personne à une autre et peut créer des atteintes internes. Chez moi, les principaux symptômes observés sont la fatigue, la sécheresse buccale et oculaire ainsi que les douleurs musculaires et articulaires. Elle évolue par poussée lente et pourrait se transformer en une autre maladie dans plusieurs années. Ce syndrome apparaît généralement autour des cinquante ans. J’admets que ce point ne me rassure pas. En effet, en allant chercher sur internet des témoignages, je ne trouve personne à qui je peux m’identifier de par mon âge et les problématiques que je rencontre actuellement. J’ai oublié de mentionné que c’est une maladie rare, incurable. Et normalement, personne n’en meurt.
La spécialiste m’a immédiatement prescrit un traitement de fond. Le but de celui-ci est de modifié les réactions de mon système immunitaire et peut-être à terme avoir moins de difficultés quotidiennes. C’est dans un monde idéal, ça. Dans la vraie vie, je dois me préparé à ne ressentir aucun changements pendant plusieurs mois. Les miracles n’existent que dans les films. De plus, en acceptant, je prenais le risque d’une potentielle atteinte à ma vue si le traitement était mal suivi ainsi que des problèmes cardiaques.
Bon, j’avais la réponse à la question que j’avais le plus demandé. J’ai le syndrome de Sjögren. J’ai réellement une maladie et je n’ai pas inventé toute ces choses désagréables.
Désormais, le problème que je rencontre c’est qu’une réponse a soulevé milles autres questions.
Tu es toujours là, à me lire? Je n’y crois pas! Merci, merci ! Et surtout, prends bien soin de toi.
Je vous propose un saut dans le temps. Au chapitre précèdent, nous n’étions même pas au début du printemps. Aujourd’hui, je vous emmène directement une saison et demie plus tard. Confortablement installée dans mon canapé, je vous écris pendant que le soleil d’août chauffe le bitume à l’extérieur. Avez-vous fait bon voyage? Êtes-vous confortablement installé? C’est important pour moi, de savoir que vous allez bien car j’ai besoin de vous confier tout ce qu’il m’est arrivé durant ces derniers mois.
Je n’ai pas écrit durant presque cinq mois. Et pourtant, il y en a des choses à dire.
En tout premier est venue la phase de la lassitude. Cet engrenage d’attente sur des blouses blanches alors que ma vie n’était apparemment pas en danger, mais juste extrêmement difficile à vivre, c’est devenu lassant. C’est long de devoir toujours dépendre d’autrui, de miracle et de résultats d’analyses. Mon adynamie est devenue mentale. Je me suis épuisée à espérer un nouvel aboutissement qui me ferait avancer, qui m’aiderait à aller mieux. Je m’accrochais à toutes les bouées mais je me suis quand même noyée. Je me battais tellement dur pour obtenir une avancée dans mes recherches qu’à un certain moments, j’ai lâché prise. J’aimerais être sûre que vous me compreniez, je n’ai pas abandonné l’idée d’avoir des réponses. J’ai simplement arrêté d’attendre celle-ci pour accepter que simplement, je suis malade. Et tous les noms de maladie de la terre entière n’enlèveront pas mes difficultés quotidiennes. Et surtout, il ne servait à rien d’utiliser ma mince énergie dans le vide.
Alors j’ai lâché prise et j’ai respiré longuement. Ça m’a fait du bien, je vous conseille d’ailleurs de respirer un bon coup. Juste maintenant.
D’où que vous me lisiez, vous n’avez pas pu échapper à la récente pandémie. Et comme beaucoup, j’ai vécu un premier confinement, d’environ deux mois, pour ma part. Plusieurs choses m’ont traversé l’esprit. Premièrement, je n’ai plus eu besoin d’aller au travail et pour une fois, je n’étais pas responsable. Cela m’a procuré beaucoup de réconfort de savoir que je pouvais me reposer, prendre du temps pour vivre au plus près de mes besoins changeants sans avoir à me soucier d’un travail et de responsabilités. La culpabilité d’être sans cesse inapte au travail s’est envolée. Je suis restée à vivre légèrement. Complètement soulagée d’un poids. Je flottais dans le temps, au gré de mes atteintes.
Ma priorité durant cette période a été de chercher les bonheurs facilement atteignable chaque jour. Je n’avais ni pression, ni compte à rendre à qui que ce soit. J’ai privilégié de rattraper toutes les séries du monde, de lire tout ce que je pouvais, de regarder le soleil. J’ai pu prendre du plaisir à m’étirer, faire une caresse de yoga et m’étendre sur ma chaise longue. J’ai passé énormément de temps à me reposer, à dormir. Et encore une sieste. Mes sensations, mes envies, mon corps. Ils étaient maîtres de mes choix et cela m’a ressourcé de me centrer autant sur moi-même.
Les avancées concernant mon dossier médical ont été à l’effigie de ma vie à ce moment précis: douce et lente.
Comme nous l’entendons très souvent, toutes les bonnes choses ont une fin.
Le travail a reprit malgré la pandémie.
J’ai été heureuse de retourner voir mes collègues, les enfants mais la réalité m’a rattrapé. Chaque journée de travail avait un goût différent. Au delà de mes difficultés et de mes habituelles douleurs, une idée se concrétisait secrètement. Ce métier n’était simplement plus fait pour moi. Ou plutôt je ne suis plus faite pour ce métier. La finalité est la même, j’en suis convaincue à présent. Je ne vais pas pouvoir continuer ainsi longtemps. C’est une question d’avenir et de santé mentale. C’est assez déprimant de voir quelque chose qu’on a aimé se transformer chaque jour en un monstre de plus en plus effrayant à affronter.
En effet, je ne veux pas que mon défi se résume à endurer mon travail au quotidien mais plutôt que je puisse investir cette énergie à être fière de réussir à faire mon travail sans peine.
Et pendant que j’étais occupée à imaginer mes nouvelles possibilités professionnelles comme une enfant rêve à devenir capitaine de bateau, il est arrivé.
OUI LUI.
OUI LE FAMEUX.
OUI JE NE L’ATTENDAIS FINALEMENT PLUS AU PIED DE LA CHEMINÉE AVEC DES COOKIES ET UN VERRE DE LAIT.
Et oui, je m’emballe mais c’est pour vous dire comme c’était intense.
Et vous avez sûrement déjà entendu dire que c’est quand nous cherchons le moins que nous trouvons. Effectivement, je confirme.
(de mars à juin 2020)
Promis, la suite arrive bientôt! Merci encore de me lire. Prends soin de toi!
Le premier événement fut l’entretien avec ma supérieure.
Avant de me rendre au travail, j’ai soigneusement répété en boucle tout ce que je voulais absolument aborder avec elle. Je souhaitais ne rien omettre. Je voulais rétablir une stabilité égarée. J’étais prête à défendre ma place au sein de l’établissement.
Je suis sortie du bureau avec soulagement. Certes, je n’avais pas obtenu la garantie complète de garder mon emploi contre vents et marées mais j’avais su me faire entendre. J’avais pu mettre des mots sur mon état, sur ma motivation concernant cet emploi et surtout, j’obtenais du temps. Dans le parcours classique d’un diagnostique, le temps est la clé. Elle ne peut pas m’assurer mon poste indéfiniment et je le conçois totalement. Pourtant à l’issue de ce rendez-vous, je suis sereine car j’ai confiance en elle. Nous avons convenu que des décisions importantes seraient prises communément, si nécessaire. Je croise les doigts que cela n’arrive pas.
Malgré que mon travail est une source d’inconfort de par mes difficultés quotidiennes, je m’y rends le cœur léger. J’ai le sentiment d’être soutenue par mon entourage professionnel et je souhaite à tout le monde de pouvoir bosser dans ces conditions! Je peux continuer à me battre pour ma santé. Je n’ai pas besoin d’être sur deux fronts à la fois.
Quelques jours plus tard, ma patience fut récompensée à son tour.
C’est lors d’un énième bilan sanguin que certaines données sont apparues anormales. Jusqu’ici, aucun test n’a été suffisamment concluant. Et pour une fois, noir sur blanc, apparaît potentiellement le témoignage de mes douleurs.
Apprendre qu’un élément dans mon sang atteste une possible pathologie me procure un sentiment contradictoire. Ce n’est pas une bonne nouvelle, de prime abord. Pourtant, c’est aussi une bonne nouvelle. Pouvoir enfin mettre en évidence qu’il y a une très probable maladie, c’est un soulagement. Cela valide ce que je tente de prouver depuis des mois. De l’autre côté de la balance, cela valide aussi que je suis malade et que c’est aussi un fait établi qui ne peut donc peut-être plus changer. C’est la première fois dans ma vie où lorsqu’une analyse sanguine n’est pas bonne, je suis heureuse. Quelle histoire saugrenue.
Malheureusement, mon médecin traitant n’étant pas suffisamment qualifié pour interpréter ces résultats, il me remet entre les mains d’une confrère.
Je vais devoir encore faire preuve de patience mais je suis motivée à tenir le coup. Je touche peut-être du bout des doigts ce que j’attends depuis plusieurs mois.
Encore merci de continuer à lire mes péripéties. Prends grand soin de toi!
Certains jours, j’attends. Je l’attends comme une enfant, le ferait pour le père Noël. Je n’ai pas réellement de preuve qu’il existe mais j’y crois aveuglément. Je suis convaincue qu’il viendra.
D’autres jours, je me résigne et pense qu’il ne viendra plus. Il est un mythe. Je dois simplement m’y faire et avancer sans.
Malheureusement, je n’ai plus cinq ans et je n’attends pas au coin de la cheminée. Je patiente pour des résultats d’analyses et de nouveaux examens. J’espère un diagnostique.
Soyons clairs, j’aimerais guérir aussi soudainement que je suis devenue malade. Je le souhaite de tout mon être. Au début, pendant que mon médecin envisageait diverses pistes, j’avais l’espoir que ça parte comme c’est apparu. Par magie. Après tout, cette idée n’est pas si saugrenue. Même le médecin avait cette pensée que certaines choses viennent et vont sans que nous puissions les expliquer. J’ai gardé cette perspective optimiste aussi longtemps que possible.
Cette état d’esprit s’est doucement fait miner par le mal constant, grandissant en moi. Plus il s’est imposé dans mon quotidien, dans mon moral, dans ma vie, plus il a effacé l’espoir que ce serait facile. Par tous les symptômes, il a revendiqué haut et fort sa présence. Son existence est indéniable, selon lui.
Pourtant, ma pathologie étant comme un iceberg, je ne peux que prouver mon préjudice par mes mots. C’est un réel désavantage. Certains jours, j’aimerais pouvoir me convaincre que tout cela n’est pas réel, que j’ai tout inventé. Jusqu’ici, les tests ne sont pas concluant pour me découvrir une maladie. Tout reste à démontrer. Quel cauchemars. Je vais me réveiller d’un mauvais rêve, ça ira.
C’est une lutte perpétuelle entre la réalité que je vis et la légitimité à laquelle je peux prétendre. Se sentir reconnue et acceptée est un chemin capricieux car il ne se fait pas seule. Je m’explique. Au moment où je souffre, je n’ai pas besoin de me prouver que c’est entrain d’arriver. Je le sens donc cela existe. C’est réel. Néanmoins, il y a plus de sept milliards d’humains sur terre et n’étant pas recluse au fond d’une forêt, je côtoie d’autres créatures de mon espèce. Je n’irais pas jusqu’à valider que l’enfer, c’est les autres comme a pu écrire Jean-Paul Sartre mais parfois, oui.
Périodiquement, je conclus que ma pathologie serait plus simple à vivre s’il n’y avait pas les autres. Les autres, c’est tout le monde et personne à la fois. Cela peut-être un inconnu dans la rue comme l’un de mes collègues mais aussi un médecin ou l’un de mes parents. Volontairement ou non, ils ont souvent tendance à remettre en doute ma potentielle maladie, la minimiser ou l’oublier. Je lis régulièrement l’incrédibilité sur les visages lorsque je dis que me brosser les dents est éprouvant certains soirs, pour ne citer qu’un exemple.
Le plus fatiguant, c’est lorsque j’entends que j’ai l’air d’aller mieux. Les apparences sont trompeuses, personne ne vous l’a jamais dit? J’ai conscience que je suis aussi un peu coupable dans cette situation. Je m’applique si bien dans mon rôle que le public me croit. Je sourie et tout va bien dans ma santé. Malheureusement, c’est loin de la vérité et parfois, je dois rappeler à mon entourage que je ne dis peut-être pas mes soucis constamment mais qu’ils ne me quittent jamais. J’ai peut-être bonne mine mais c’est un indicateur contestable.
Je ne colle pas à l’image que la société attend d’une personne souffrante. Dans l’imaginaire collectif, le mal se lit sur l’apparence. Le visage est cerné, le teint blafard et les vêtements négligés. Comment cela se passe-t-il dans mon cas? Où est ma place?
Je soigne mon apparence et ce n’est pas simplement pour prétendre d’être en bonne santé. C’est une question de respect vis-à-vis de moi-même. Je dois continuer à prendre soin mon corps pour mon propre bien-être. J’ai le devoir de faire tout ce qu’il est possible pour me sentir bien. Honnêtement, je me sens mieux dans une robe que j’affectionne que dans un jeans/t-shirt. Alors non, je n’essaie pas à tout prix de cacher les miettes sous le tapis mais plutôt de panser mes déboires en gardant une belle estime de ce que je suis. Et cela me joue des tours. Je comprends que visuellement vous soyez perdus lorsque vos yeux constatent un beau paysage mais que dans la description, vous lisiez qu’une catastrophe naturelle est en cours. C’est contradictoire. C’est invisible.
J’ai l’impression d’être enfermée dans une case où mon devoir est de me laisser dépérir, déprimer et de devoir presque exagérer mes maux pour être traitée comme une personne malade.
En reprenant cette hypothèse où tout se résorberait de manière surnaturelle, j’en viens à comprendre pourquoi je m’y accrochais. Premièrement, cette hypothèse n’induisait pas de conséquences sur mon futur. Je reprenais ma vie d’avant et tout irait bien dans le meilleur des mondes. Deuxièmement, je n’avais pas de maladie. C’est-à-dire, pas un problème de santé qui serait peut-être permanent, dégénératif ou même fatal. J’étais dans une sorte de déni de la réalité. Ainsi, s’il n’y avait pas de diagnostique, il n’y avait pas de conséquences indésirables. J’ai compris récemment que ce n’est pas en fermant les yeux que l’incendie s’éteindra. Il faut ouvrir les yeux, prendre la lance et combattre les flammes!
Donc, j’ai peut-être l’audace d’aller visiblement bien et cela mérite rarement la validation de mon état par le monde m’entourant. Je ne peux rien faire de plus. Rien de plus si ce n’est valider l’existence de mon malaise auprès de moi-même. Je cesse de croire que c’est une histoire psychosomatique magique qui s’en ira d’elle-même. Les valises sont posées, elle est installée, c’est indiscutable. J’ouvre les yeux. Je n’ai pas le pouvoir de changer la manière dont la société me perçoit. Néanmoins, je peux réunir suffisamment de force et de courage afin de démontrer concrètement ce que je vis.
C’est pour cette raison que je vous écris.
C’est pour cette raison que je continue à consulter mon médecin et à creuser toutes les suppositions possibles. Je recherche la validation de mon état.
Et récemment, mes espoirs et mes efforts ont été nourris, affaire à suivre.
(écrit en mars 2020)
Hé toi! Merci, merci et encore merci de me lire! Prends bien soin de toi, c’est important!
J’avais l’habitude de commencer chaque nouvelle année dans la joie et l’impatience de réaliser tout un tas de projets. Encore une habitude à mettre au placard.
En entamant cette année, je n’ai ni projet professionnel particulier, ni défis personnels à relever. L’unique chose que j’ai en tête, c’est la survie.
Je pense que survivre résume bien le mois que j’ai passé. Il n’y a que dans nos calendriers que quelque chose a changé. Dans mon carnet de santé, rien a bougé. Je dirais même plutôt l’inverse. Cela s’est encré encore plus profondément dans mon quotidien. Ma vie est vite résumée à aller travailler, à un taux ridicule, en serrant les dents puis, réussir à trouver la force d’effectuer le nécessaire pour vivre. Je parle du strict minimum. Je me fais à manger avec difficultés et parfois cela me prend une demie heure pour éplucher une carotte. Après l’effort d’une douche, je suis souvent prête à dormir. Mes sorties et loisirs sont pour me rendre à la pharmacie ou chez le médecin. Mes relations sociales se déplacent jusqu’à mon appartement et elles sont rares. Ces constats sont déprimants. À la maison, j’occupe mon esprit de séries et de livres. Et parfois, je n’ai pas la force, je m’allonge simplement. J’attends que l’épuisement passe. Peut-il passer?
Cette lourde masse pèse sur mon corps. Elle est désormais comme une seconde peau. J’ai l’impression de vivre dans une nouvelle enveloppe charnelle. Elle m’est étrangère et m’envoie un tas de sensations que je n’avais jamais ressenti auparavant. Je n’avais jamais autant consciente de mon corps avant tout ça.
Autrefois, je ne me rendais pas compte la force dont j’avais besoin pour me servir un verre d’eau, à l’aide d’une bouteille. Autrefois, ouvrir les stores était une course contre la montre, j’essayais chaque jour de battre un nouveau record. Autrefois, je galopais dans mon appartement avec aisance.
Autrefois, je n’avais pas besoin de ressentir chaque mouvements comme un terrible événement.
C’est dans les courtes journées de janvier que l’espoir d’aller mieux se perd. C’est dans cet engrenage de douleurs continuelles que ma positivité faiblit.
Le coup de grâce m’a été asséné par ma directrice, deux jours avant la fin du mois. Nous travaillions ensemble, sur un projet et à la fin de celui-ci, elle me parla de ma situation. Elle m’expliqua qu’il était difficile pour elle d’avancer en ne sachant que d’un mois à l’autre pour mes remplacements. Elle me décrivait la situation comme inconfortable pour tous en me donnant divers choix. Je pouvais convenir avec elle pour baisser mon taux de travail, de manière fixe. Ou bien, voir avec mon médecin pour qu’il me dise sur du long terme, dans combien de mois je pouvais espérer un rétablissement. Bref, elle me mettait un ultimatum. J’ai tant redouté que ce jour arrive que je ne m’y attendais plus. La deadline, c’est mon prochain rendez-vous médical.
Cette conversation m’a laissée sans voix. Après celle-ci, j’ai rejoins mes collègues. J’ai fait comme si rien ne s’était passé.
La vérité, c’est que je ne dors plus aussi bien depuis la nouvelle. Je suis anéantie. Ma pathologie a encore franchi un cap bien trop concret. Je ne peux plus revenir en arrière.
Je me suis mise à imaginer plusieurs scénarios.
Évidemment, j’aimerais pouvoir avoir le choix de baisser mon pourcentage afin de ne déranger personne avec ma santé défaillante. En plus, je ne me sentirais plus sous pression de devoir absolument guérir vite. J’aimerais sincèrement. Malheureusement, je n’ai pas les fonds financiers nécessaires. La vie est chère et les médecins aussi.
Cette option est caduque.
Ensuite, si mon médecin était magique au point de pouvoir prononcer la date de fin de ce cauchemars, ce serait déjà chose faite.
Je ne sais pas trop si ma directrice a eu conscience pendant une seconde que la première a en souffrir, c’était moi. J’ai non seulement tous les symptômes, en plus de la pression de mon travail, de la pression que je mettais toute seule et tout le reste. J’ai le ticket gagnant que personne ne veut. Et je comprends que je ne suis pas rentable pour elle. J’aurais aimé un peu plus de tact. Depuis cette discussion, je me sens sur un siège éjectable. J’avais déjà du mal à m’investir dans mon travail mais là, c’est l’envie qui en prend un coup. Et quelque part, je comprends aussi sa position délicate dans cette histoire.
En cogitant, j’ai souvent eu la pensée que si je perdais mon emploi, c’était le début d’une catastrophe. Cela allait engendrer tellement de choses négatives. Je ne vais pas étayer tous les plans possibles car ils sont déplorables.
Et j’ai vite repris le dessus grâce à mon médecin. Je crois que c’est la première fois où il m’apporte quelque chose de positif.
Lors du fameux rendez-vous, je lui ai expliqué l’état alarmant dans lequel je me trouvais. Il a été à l’écoute et comme à son habitude, très optimiste. Je ne suis pas d’accord avec tous ces propos. Je ne suis pas convaincue que je vais guérir de si tôt ou que tout va bien aller. Cependant, il m’a dit de défendre ma cause auprès de ma supérieure. Il m’a fait comprendre que je baissais les bras, comme si tout était déjà perdu. Cela ne me ressemble pas.
Je dois continuer à me battre et temporiser la situation avec elle.
Il faut que j’aille la voir et lui expliquer que certes, je suis d’accord avec elle, la situation n’est pas confortable. Il faut qu’elle sache que j’aime cet endroit, que j’aime mon travail et que j’ai beaucoup à apporter. Il faut qu’elle me laisse une chance, un temps de plus. Admettons aussi qu’au lieu d’être tombée malade, je sois tombée enceinte. Ah non, ma comparaison est maladroite car dans le cas d’une grossesse, ce n’est premièrement pas une maladie et deuxièmement, nous avons tous une idée de comment cela se passe en terme de délai. Je n’ai pas la date de fin de toute cette histoire et je ne suis même pas sûre qu’elle existe.
Bref, l’entretien est fixé au deuxième jour de février. Je ne vais pas me laisser faire. Je dois survivre.
À toi qui lis ça, je te remercie du fond du coeur d’avoir pris ce temps. Prends soin de toi.
C’est un vaste sujet un peu sensible auquel je m’attaque. C’est comme si j’avais un gros devoir, à rendre impérativement. Et il me paraît si difficile à travailler que je ne sais pas par quel versant de la montagne commencer. Et peut-être qu’à la fin, je me dirais: « Oh ben, c’était pas si compliqué ».
Allons-y ensemble. Ensemble, c’est toujours plus facile.
La culpabilité.
Elle porte différents visages. Ils ne se présentent pas tous à la fois. La culpabilité a une petite voix sournoise qui me chuchote que j’ai mal agit. Elle m’induit de négativité et forme une boule au centre du corps, non loin de l’estomac. Cette pression dans mon abdomen est chaude, lourde et malveillante. Sur le point de m’endormir, elle finit par me garder aussi éveillée qu’une tasse de café. Elle active mes neurones afin de cogiter. Mais surtout, dans mon cas, je ne suis coupable de rien. Je n’ai pas commis d’infraction, si ce n’est de vivre. Et je le sais. Malgré tout, j’ai beau me le répéter, quand elle pointe le bout de son nez, il m’est difficile de la chasser. Heureusement, depuis que je suis malade, elle ne me rend visite que de manière ponctuelle et pas quotidienne. Lorsqu’elle vient, elle élit domicile dans ma tête l’espace de quelques jours, puis s’en va sans que je m’y attende.
Je ne suis plus très sûre de l’ordre dans lequel j’ai rencontré ses diverses facettes. J’ai l’impression que la première était liée à l’impuissance de ma situation.
C’est au moment où j’ai compris que j’avais une pathologie réelle malgré qu’elle ne soit pas encore définie que je me suis sentie comme si le ciel me tombait sur la tête. Comme beaucoup, la première réaction, c’est l’interrogation de: « Pourquoi moi? ». Juste après m’être sentie frustrée que la vie est choisi un chemin si sinueux pour moi, j’en venais à culpabiliser. Qu’avais-je fait de mal pour mériter ça? Encore mieux, je remettais en question ma manière de vivre en me disant que j’avais sûrement dû faire les mauvais choix, pour en arriver là. Il fallait que je comprenne.
J’ai toujours cultivé une relation amicale avec mon corps. Je le remerciais lorsqu’il me rendait service et prenait soin de lui quotidiennement. La culpabilité changeait tout cela. Elle me rendait hostile vis à vis de lui. Je n’en voulais pas qu’à mon esprit mais aussi à mon physique. Je me demandais parfois, en pleurant, pourquoi il décidait de me lâcher. j’avais le sentiment d’avoir toujours fait mon maximum pour cette enveloppe corporelle et là, elle me remerciait de la sorte. Je me sentais trahie par ma propre personne. Une lutte interne si violente que l’instant de quelques secondes, je haïssais mon corps de me faire endurer ça.
Je me reprenais très vite, pour m’excuser auprès de lui. J’essayais de lui expliquer que je ne comprenais pas encore ces raisons mais que j’étais avec lui dans ce bateau en pleine tempête. Une petite nuance qui est venue récemment s’emmêler dans cette culpabilité-ci, c’est le sabotage. J’ai l’impression de me saboter toute seule. Je m’explique. Tandis que ma maladie s’affranchit, les changements concrets aussi. Et certains d’entre eux, sont effrayants. Par exemple, la perspective d’être virée de mon emploi me terrorise. J’en viens à me faire une morale irrationnelle où il faut que j’arrête toutes ces conneries. Mais oui, demain je reprends juste ma vie d’avant et ça ira. Et la seconde d’après, généralement, mes douleurs s’affirment pour me souligner à quel point mes propos sont idiots. Je vous dis, c’est un bordel sans nom dans ma tête quand je culpabilise . Et ce n’est pas tout.
Il y a aussi la culpabilité vis à vis des autres. Je ne remplis tellement plus mon rôle de valide que cela impacte d’autres personnes. L’exemple du travail est parfait pour illustrer. Certes, je suis retourné travailler mais n’étant plus la même, je m’en veux de ne fournir que la moitié de ce que je faisais avant. Je suis peut-être dure envers moi-même mais c’est compliqué de se rendre compte que mes collègues souffrent aussi de ma situation. Non pas parce qu’elles ont beaucoup d’empathie, ce n’est pas de ça dont je parle. Mon travail n’est pas un tas de paperasse à remplir. Mon travail, c’est de petits êtres et des parents qui comptent sur moi. Je ne suis pas irremplaçable, mais le bon fonctionnement d’un groupe d’enfants en collectivité requiert de la stabilité. Les remplaçantes défilants au gré de mon état, ce n’est pas possible. Mes collègues doivent prendre certaines de mes tâches pour garantir une certaine qualité d’accompagnement. Et à la fin, je m’en veux d’être comme ça. D’être un objet cassé, complètement inutile et ne sachant jamais quand le service après-vente pourra s’occuper de mon cas. Mon employeur ne m’a pas engagée pour ça. Je ne me suis pas engagée à cette vie-là.
Mes mots vous semblent peut-être rude. Je partage votre avis. J’observe d’ailleurs que ces pensées sont sournoises. Non seulement, je me torture l’esprit, à m’en vouloir mais en plus j’arrive à être méchante envers moi-même. J’arrive à penser des mots blessants. Je ne sais pas comment vous le dire tellement cela ne me ressemble pas. Je me lance.
Il m’est arrivé de me dire que je ne méritais peut-être pas de vivre. Peut-être une vie si compliqué n’avait pas vraiment de sens. Peut-être, je pouvais me permettre d’abandonner, juste une fois. Alors, je vous rassure, je n’ai pas pensé concrètement à mettre fin à mes jours. En réalité, au moment où j’ai eu cette effroyable idée, je me suis tout de suite calmée. Je n’ai même pas essayé de chercher comment la vie serait sans moi ou qui j’allais faire souffrir, non. Je me suis accrochée à ma personnalité. J’aime la vie. Je ne suis pas d’accord d’abandonner le combat. Malgré les difficultés, les pleurs et les douleurs, ce n’est pas moi. De plus, je reste toujours motivée par les erreurs de parcours. C’est désagréable de se tromper, de faire faux. L’avantage, c’est qu’il y a toujours un apprentissage derrière. J’ai la sensation que plus le parcours est sinueux, plus la leçon est enrichissante. C’est ma vision des choses, même si ça me déplaît. C’est ma bouée de sauvetage. J’ai besoin d’une lueur d’espoir, c’est mon phare dans la tempête.
Le plus fou, c’est que je sais pertinemment que me sentir coupable n’est ni justifié, ni profitable. Encore pire, j’ai conscience que le mental impacte le physique. Si je souhaite m’aider à aller mieux, je dois me défaire des ces pensées parasites. Et là, je peux m’en vouloir de maltraiter mon esprit. Bref, le chemin est encore long. Les clés sont dans mes mains, il me faut apprendre à les utiliser.
J’ai gardé le pire pour la fin. L’aspect qui me fait le plus souffrir de la culpabilité, c’est vis-à-vis de mes proches. C’est différent de la culpabilité éprouvées pour les autres, en général. L’idée est la même mais en plus douloureuse. Je dois admettre que j’ai du mal à gérer ma maladie face à ceux qui me sont chers.
J’ai besoin de soutien et de leur en parler. J’ai confiance en eux et je sais qu’ils souhaitent mon bien-être. Je me sens en sécurité en partageant mes vérités avec eux. Le problème c’est que je me rends bien compte qu’ils n’ont pas nécessairement les armes pour faire face à ce que je leur explique. Je me rends compte qu’ils se sentent aussi démunis de n’avoir pas de solutions.
Parfois, dans leur propos, je reçois de la colère. Je comprends qu’elle ne m’est pas destinée mais elle me touche. Le pire pour un parent, c’est de voir son enfant souffrir. Je le vois bien. C’est un cercle vicieux. Je ne veux pas que mes douleurs fasse souffrir mes semblables. Mes semblables ne souhaite pas me voir souffrir. Personne ne sait vraiment où se placer. Je ne peux pas témoigner en leur nom et vous dire tout ce qu’ils ressentent. Du mien, je vous le disais, c’est compliqué et ça me joue des tours.
Parfois, je ne parle tellement pas de mes difficultés quotidiennes qu’ils oublient. Comme s’il ne m’arrivait rien. Et lorsque j’ose manifester mes déboires, soit ils sont surpris de la gravité, en remettant presque en cause mes propos soit ils sont en colère, vis à vis de la situation. Je ne sais pas sur quel pied danser. J’ai besoin de leur soutien mais je ne souhaite pas les blesser. Je suis un problème de plus dans la vie de ceux que j’aime. Un poids. J’ai besoin de leur aide et je ne sais pas si je pourrais leur rendre l’appareil un jour. Que je sois malade, je peux l’accepter et l’endurer. Que cela impacte les être aimés, je ne suis pas d’accord, c’est au dessus de mes forces. Je me sens coupable de leur faire ça car j’estime, qu’ils ne le méritent pas.
(écrit en décembre 2019)
C’était un chapitre dense, merci de m’avoir lue et à très vite !
Aux dernières nouvelles, mon temps était pris entre ma grosse boule de poils blancs, mes projets professionnels et ma santé. L’envie de lire et d’écrire étaient sur pause, me laissant ainsi l’opportunité de me gorger d’expériences nouvelles, de mots et d’idées à retranscrire plus tard.
Le temps de vivre légèrement, de me laisser porter.
Et puis tout s’est accéléré.
J’ai trouvé un emploi et avant que vous sautiez de joie pour moi, je dois dire tout ce que j’en penses.
J’ai arrêté un métier que j’aimais, j’ai quitté un secteur dans lequel je me sentais à mon aise. Et tout ça, à contre-coeur, à cause de ma santé. Peut-être qu’un jour je pourrais dire que c’est grâce à elle mais j’en suis encore loin. Pour l’instant, j’ai vécu un déchirement professionnel que j’ai pansé tant bien que mal. Et je sais que dans la globalité, la suite des choses pour que je retrouve une vie stable, je dois refaire une formation afin d’avoir un titre qui me permettra de trouver un emploi. Malheureusement, mes contraintes physiques m’empêchent de trouver le premier petit boulot venu, car c’est souvent trop physique.
Alors bon, j’ai mûri des idées réalistes afin de retrouver ma place dans le monde du travail. J’ai l’impression d’avoir fait un bond en arrière, retour à mon jeune âge où j’étais assaillie de questions sur l’avenir. Sauf que cette fois, il y a la complexité de trouver ce que je veux faire, ce que je peux faire physiquement et ce qui est possible de faire. Le tout en un métier. Et ça, c’est un peu contraignant mais heureusement, je suis une adulte (enfin, je crois, mais c’est un autre débat) et je dois croire en mes capacités. Parce que je dois avouer que ça me semble aussi lointain et compliqué que lorsque j’étais ado. Je m’imaginais déjà avec les bancs de l’école bien derrière moi! Qu’est-ce que je me suis fourré le doigt dans l’oeil! Bon bref, je sais que je vais finir par me former mais dans l’organisation, c’est pas pour tout de suite, je dois patienter une année.
Bon et du coup, en attendant, il faut bien trouver quelque chose pour vivre. J’ai beaucoup hésité à employer le mot survivre. À vous de choisir, même si plus j’y pense, plus je crois que survivre est le mot que je choisirais dans ce cas-ci.
J’ai commencé mes recherches, à gauche, à droite, vaguement convaincue. Mon médecin a établit une liste de restrictions mais dans la globalité, il me fallait un job de bureau. Ne plus porter de charges, ne plus rester debout, ne plus se déplacer toute la journée. Difficile de convaincre un quelconque employeur de m’embaucher, même sans parler de ma santé, dans un job où je n’ai ni expérience, ni diplôme. Et finalement, j’ai tout de même trouvé, malgré tout et sans que je m’y attende finalement. Alors, c’est loin d’être le travail dont je rêve, mais ça rentre dans les cases de ce qui à priori, devrait m’aller. Enfin, ça c’est dans le plan. Avec mon médecin, nous avons estimé que je pourrais travailler à 100% mais dans la réalité des faits, ni lui, ni moi ne pouvons savoir si je vais réussir à gérer tout ça.
Et c’est ça, exactement ça qui me fait mourir de trouille.
Je suis au début d’une nouvelle aventure et elle m’effraie. Je ne doute pas forcément de mes capacités en tant que telles mais plutôt, je reste frileuse à l’idée d’être trop confiante. J’ai peur que comme avec mon emploi précèdent, ma santé me joue à nouveau des tours et que je m’écroule, encore une fois. J’ai l’impression d’être un château de carte en plein air. Tout peut arriver, à n’importe quel instant.
J’ai envie d’être optimiste et de me dire que c’est une nouvelle page qui commence mais je bloque. Je ne peux m’empêcher de ressasser ce que j’ai vécu. Ces journées où je rentrais du travail épuisée et où je m’effondrais dans ma cuisine, le ventre vide mais n’arrivant plus à tenir debout pour me préparer à manger. Je me souviens comme ma tête était pleine d’hurlements de douleurs que je ne savais pas gérer. Je sais aussi qu’à cette époque je n’avais pas de traitement de fond, que je ne savais pas de quoi je souffrais. Alors je comprends que je ne peux pas comparer cette période. Je sais que l’histoire ne se répète pas nécessairement à chaque fois, mais tout de même. Je garde cette boule au ventre. J’ai peur de me rétamer et je crois que c’est humain.
Alors même si aujourd’hui, j’ai des outils pour vivre avec mes maladies, même si aujourd’hui, j’ai repris du poil de la bête et quand bien même, j’ai soif d’avancer. J’avance prudemment, pour me préserver. J’essaie de ne pas avoir trop d’attente sur ce corps. Si j’arrive à assumer le travail à temps plein, ce sera une victoire. Et si c’est le contraire et bien je saurais que j’ai besoin de limiter mon temps.
Dans mon dernier emploi, j’ai eu tellement de mal à lâcher, car j’étais passionnée que je me suis épuisée. Même à la limite de l’incapacité à marcher, je mettais des stratégies en place pour m’y rendre. Je donnais toujours plus, je souffrais toujours plus et je retiens qu’il m’a fallut des mois et des mois pour remonter un bout de la pente. Alors ce qui est sûr, c’est que cette fois-ci, je ne pousserais pas. Oui, je ferais les efforts car il va en falloir pour se lever, les jours où les symptômes seront plus forts mais je n’irais plus au-delà du raisonnable. Je ne souhaite pas que l’histoire se répète.
Il y a aussi le fait que mon futur employeur ne sait pas d’où je viens. Durant l’entretien d’embauche, je ne savais vraiment pas où me mettre, je ne savais pas quoi dire concernant le blanc dans mon cv. Normalement, si j’avais suivi mes valeurs qui prônent la transparence et la sincérité, j’aurais évoqué que j’avais des soucis de santé, toujours actuels et me forçant à réinventé ma vie professionnelle. Sauf que dans la vraie vie, dire qu’on est malade, ça fait peur aux patrons. Forcément, lui, il souhaite engager le meilleur parti possible. Il veut un employé sur qui il peut compter. Il ne souhaite pas qu’un beau matin, son employé ne puisse plus venir travailler, sans prévenir. Alors même si ce job ne me faisait pas de l’oeil, je ne voulais pas gâcher mes chances de gagner de quoi payer mes prochaines factures. Alors je suis restée vague, prônant mon meilleur sourire, disant que j’allais bien.
Et au fond, en ce moment, je ne vais pas si mal. Mais l’incertitude fait entièrement partie de ma vie et je trouve dommage de devoir le cacher. J’ai l’impression d’avoir menti. Et encore pire, désormais, je vais devoir jouer un double jeu.
Avec mon ancienne directrice, nous étions très transparentes. Elle savait tout de ma situation et mes collègues aussi. C’était une chance unique et je la mesure pleinement. Et je regrette d’autant plus de ne plus être faites pour travailler parmi eux.
Parce que non seulement j’ai le sentiment d’avoir baratiné mon futur patron mais en plus, je suis à nouveau masquée. Je ne pourrais pas me sentir épanouie auprès de mes collègues ou de mes supérieurs. Je recommence une double vie où il y a la Lili, en apparence complètement valide, toujours souriante et de l’autre côté, il y a la Lili qui se rend presque chaque semaine chez le médecin, qui est fatiguée et qui a mal partout. Et c’est dur, je trouve, de séparer ma santé de ma vie globale. Certes, mes pathologies ne me définissent pas mais elles ont un impact concret sur ma vie. Les éluder, ce sera cacher une grosse partie de ma vie quotidienne sous le tapis. Et j’espère tellement réussir à caser mes rendez-vous médicaux sans déranger mon emploi mais je sais déjà que ça va me coûter en énergie. Courir d’un endroit à l’autre, se lever encore plus tôt. C’est aussi pour ça que j’ai peur du temps plein. C’est pas le samedi que je vais pouvoir aller faire mes prises de sang. C’est pas à 18h30, quand la journée de travail est terminée que je vais pouvoir m’y rendre non plus. Et maintenant que j’y pense, je redoute aussi de retomber dans ce cercle vicieux sans place pour les loisirs. Ce cercle où je suis tellement épuisée que j’enlève doucement tout ce que j’aime pour ne garder que l’essentiel pour vivre. Avoir un travail pour pouvoir manger, aller chez le médecin pour prendre soin de ma santé et me reposer pour pouvoir mieux recommencer.
Bref, vous l’aurez compris, je suis à l’aube d’une nouvelle aventure qui me fout la pétoche. Et je suis malgré tout heureuse d’avoir cette opportunité et j’espère que j’en tirerais le plus de positif possible. J’y vais avec retenue mais le coeur confiant.
Et autrement, je n’ai donc pas trop suivi tout ce qu’il s’est passé sur wordpress. J’espère que toi qui me lis, tu vas bien. Je crois que ça serait me mettre trop de pression que d’essayer de rattraper tous les articles que vous avez tous publiés. Néanmoins, sens toi libre de me partager dans les commentaires un article qui te tiens à coeur, que tu penses que je souhaiterais lire. J’apprécierais grandement!
Et j’ai une dernière nouvelle à te partager. Je reprends la publications des chapitres de Récit de vie. Il n’en reste plus beaucoup, ils sont presque tous prêts et je vais les publier régulièrement. J’espère que tu apprécieras toujours.
Je profite de te rappeler que je te remercie du temps que tu passes ici, ça signifie beaucoup pour moi.
J’ai beaucoup évoqué certains symptômes mais aujourd’hui, j’aimerais vous proposer de les expérimenter. Je vous propose un voyage à l’intérieur de mon corps. Comme si nous échangions pour quelques minutes. Je vous promets, cet échange n’endommagera pas votre état. J’espère simplement vous offrir la compréhension, de l’intérieur. Allez, mettez mes lunettes, pour voir ce que j’y vois! Sautez dans mes baskets pour sentir pourquoi je ne saute plus! Pour plus de réalisme, je vous propose de réellement imaginer les sensations dans vos membres.
Commençons par le début, le matin. Vous êtes sous votre couette, au chaud. Votre réveil n’a pas encore sonné mais vous êtes déjà entrain d’émerger. Pourtant, il n’y a pas de regain d’énergie dû à la nuit. Il y a l’envie de dormir, la tête lourde. Vous persévérez pour retrouver les bras de Morphée mais vos jambes ne sont pas du même avis. Un flux d’énergie désagréable parcourt vos jambes. Il part de la pointe des pieds pour passer par vos genoux et finir au milieu de vos cuisses. Dans les deux jambes, ce courant électrique est incessant. Il vous tire de votre sommeil, contre votre gré. Il a une demande particulière. Il faut bouger. Bouger les orteils. Plier et déplier les genoux. Vos jambes prennent un rythme effréné alors que votre unique souhait, au fond, c’est dormir à nouveau. Mission impossible. Il faut abandonner.
Vous avez encore perdu cette lutte. C’est la même chaque jour. Parfois vous abdiquer plus vite tellement l’adversaire est redoutable. Parfois, il est si faible que vous repartez dans le sommeil pour quelques instants.
Vous vous levez et c’est là que ça se complique. Vous mettez le poids de manière équitable entre vos deux jambes mais très rapidement, la droite vous crie de l’alléger. Vous obéissez. La gauche endosse une plus lourde responsabilité.
Se rendre dans la salle de bain devient un parcours du combattant. Il faut gérer l’équilibre sur une jambe et demie, éviter les murs, les portes et les meubles. En effet, aujourd’hui, sans vous en rendre compte, quand vous penserez que votre cerveau a bien calculé les distances, votre bras s’accrochera dans la poignée de porte. Vous avez eu tort et vous gagnez un nouvel hématome. Vous verrez que plus la journée avance, moins vous vous souviendrez quand vous vous êtes donc fait ce bleu sur la cuisse ou encore celui sur le coude. C’est un peu comme si vous aviez bu, sans les dangers pour le foie. Vous êtes complètement saoul dès le réveil. Une merveille! Et si je peux faire une analogie avec mon travail, j’ai l’impression de me retrouver dans les enfants qui apprennent à marcher. Ils font preuve d’une maladresse sans limite. Vous aussi, pour votre journée spéciale dans un corps défaillant.
Lorsque vous allez vous préparer, se baisser pour prendre une paire de chaussettes dans le tiroir va vous donner la saveur d’avoir gagné 40 ans de plus. La souplesse s’en est allée. La raideur a reprit le poste. Vous vous pliez en deux, tant bien que mal et une fois relevé, votre cœur bats comme jamais. Un tambour a pris un rythme cadencé dans votre poitrine. Et parallèlement, la tête tourne. Vous êtes encore bourré, vous manquez de tomber. Heureusement, il y un mur contre lequel se rattraper. On repassera pour la douceur.
Autrefois, vous pouviez enfiler vos chaussettes en vous baissant, sur un pied. Aujourd’hui, il est impératif de vous asseoir sur le lit.
Idem pour mettre votre pantalon.
Vous vous étiez jamais posé autant de questions pour les actions les plus banales de votre quotidien et ce n’est que le début!
Une fois habillé, vous vous rendez prendre le petit déjeuner. Votre premier repas se constitue d’une ribambelle de gélules et comprimés. Pendant que vous avalez votre verre d’eau bien accompagné, vous ressentez votre jambe droite. Elle vous rappelle à l’ordre à nouveau. Elle est sévère et ne vous loupe jamais. Vous basculez sur le pied gauche, laissant la droite flotter au dessus du sol.
Ce matin, vous avez faim et le temps. Vous vous lancez dans l’idée de faire une omelette. Vous sortez un bol, cassez deux œufs dans celui-ci. À l’aide de votre fourchette la plus matinale, vous battez votre bouillie. Quelques secondes plus tard, une lancée part de votre coude et vous paralyse le bras. Pause dans la recette. Vous reprenez, tout se passe bien malgré que vous sentez votre cœur jouer de la batterie, à nouveau. Lorsque votre mission est achevée, vous sortez une lourde poêle. Elle est lourde parce que c’est une journée dans mon corps, car en réalité, vous venez de saisir la plus légère de son régiment.
Bon appétit.
Après votre repas, vous n’avez pas la force de faire la vaisselle, cela inclue d’utiliser vos bras mais vous ne les sentez plus depuis l’épisode culinaire. Et vos jambes sont du même avis.
Vous êtes déjà lessivé. Une fatigue forte appuie sur vos épaules. Le sol essaye de vous engloutir.
Vous partez travailler, parce que la vie continue malgré tout.
J’habite dans une pente et vous devez descendre en direction des transports publiques. La descente, c’est l’une de vos nouvelles bêtes noires. Allonger la pointe du pied en contrebas, y mettre son poids pour finalement recommencer le même scénario sur l’autre patte. Vos pas se raccourcissent à droite. La gauche est malmenée mais elle le fait pour sa jumelle bien aimée. Mentalement c’est une lutte. Il ne faut pas se focaliser sur cette douleur qui part depuis le centre du mollet. Il se crispe perpétuellement mais vous parvenez à songer à d’autres choses. Votre genou a remarqué que vous ne l’écoutiez plus, il se met à craquer. En signe de représailles, toute votre jambe droite commence une étrange danse de sensations les plus inconfortables et désagréables les unes que les autres. Vous avez clairement mal mais vous voilà arrivé au métro.
C’est l’heure de pointe, vous allez rester debout. Il faut vous tenir solidement. N’oubliez pas que vous êtes presque unijambiste à ce stade. Votre jambe droite est une figurante et lorsque vous oserez compter dessus, elle cédera sous votre poids. Vous ne voulez pas tomber en public, déranger les gens. Vous vous agrippez de toute vos minces forces. Tous vos muscles se crispent, pour tenir. Vous êtes faible et vous oscillez en cadence.
Vous êtes enfin au travail, après tous ces efforts, c’est déjà une victoire considérable. Vous avez déjà la nette impression d’avoir vécue une journée complète, tellement vous vous sentez à bout de forces. Malheureusement, ce n’est que le début d’une journée.
Si ce matin vous avez eu du mal à tenir debout et éviter les obstacles, je vous présente le niveau au dessus. Mon travail se déroule dans une salle où des enfants passe leurs journées. Le travail des enfants, c’est de jouer. Le sol devient un champ fertile de jouets. Il faut désormais composer avec une donnée en plus. Vos chances de tomber augmentent considérablement.
Vous n’aviez pas encore remarqué comme votre pied droite accrochait au sol. C’est seulement lorsque vous essayez d’aller vite parce que le travail l’oblige, que vous le constatez. Et vous manquez de trébucher. L’obstacle cette fois, ce n’était pas un jouet ou un meuble mais juste votre pied. Comme si vous ne saviez plus trop comment on met un pied devant l’autre. Pourtant, c’est comme le vélo normalement, ça ne s’oublie jamais, non?
Votre propre poids vous paraît déjà être de trop? Allez, portez un bébé pour voir quel exploit je relevais avec cette enveloppe corporelle capricieuse. Vous avez maintenant un bébé de dix mois dans les bras, ainsi que la responsabilité qu’il ne lui arrive rien. Il est d’ailleurs sûrement plus costaud que vous à l’instant.
Une collègue, vous regarde et vous parle. Vous voyez ses lèvres bouger, vous entendez des sons et malgré tout ça, vous ne parvenez pas à comprendre ce qu’elle vous dit. Ça grésille dans votre tête. Une épaisse fumée vous empêche de décoder les sons. Tout se ressemble et rien de s’assemble. Vous demandez de répéter, gentiment et redoublez d’attention. Cette fois, vous avez compris. Youpi. Néanmoins, parfois, vous allez acquiescer pour ne pas paraître à l’ouest, même si vous n’avez rien compris.
Dans votre tête, malheureusement, les alarmes sonnent, de plus en plus fort et il devient difficile de réfléchir. Il n’y a pas de calme intérieur. À l’intérieur, c’est la guerre.
Et n’oubliez pas que vous aurez le cœur qui bat à chaque petit effort, que vos douleurs iront en grandissant, jusqu’à ne plus pouvoir se faire oublier. Votre fatigue du matin se transformera à la fin de la journée, en épuisement.
Bon, j’ai de la peine de vous voir à ma place. Je vais abréger vos souffrances. Pourtant, je ne vous ai pas raconter comment trouver le sommeil m’est difficile certains jours où mon unique désir est de dormir. Je ne vous ai pas dit comme j’ai soif en continu et que malgré les litres avalés, ma langue reste sèche. Je vous épargne ma mémoire qui est saturée. Mes membres qui à mon sens pèsent soudainement le double. Je vous évite de devoir choisir entre cuisiner ou manger, car le soir venu, tout n’est plus que choix. Je vous enlève tous les commentaires maladroits et désagréables auxquels j’ai eu droit. Je ne vous parlerais pas non plus de mes yeux qui se brouillent, me brûlent et parfois, m’ôtent l’envie de les ouvrir. Certains jours, le fil de fer remplace ma musculature. Chaque jour est semblable à un funambule, toujours prêt à tomber, luttant contre le déséquilibre perpétuel. Luttant contre le vide, la chute.
Je vous rends votre bien-être et je vous remercie d’avoir osé, ce n’était pas de tout repos, je le sais bien.
PS: Si tu observes de grosses fautes d’orthographes, très vilaines, n’hésite pas à me le dire! Je te remercie de tout coeur de me lire et promis, la suite arrive bientôt!
Je vous propose une parenthèse dans mon récit, afin d’aborder le monde merveilleux des cabinets médicaux. Je souhaite tout d’abord témoigner ma gratitude envers ces personnes qui ont étudiés de longues années dans le but de soigner autrui. J’aime l’humain, j’aime en prendre soin mais je n’aurais jamais eu la capacité de me plonger dans une voie aussi exigeante. Alors, je vous remercie d’exister.
De plus, je tiens à vous prévenir, je vais vous parler de divers praticiens auxquels j’ai eu recours et parfois, mon discours ne sera pas des plus tendre. Je m’en excuse. Vous saurez tout, mes émotions, mon ressenti et ma version des faits. Je ne doutes en rien des capacités de ces personnes. Néanmoins, je pense qu’il y a de mauvais professionnels dans tous les corps de métiers et même s’il sont sûrement peu, j’en ai croisé, pour ma plus grande joie.
Mais alors, qu’est-ce qui caractérise un bon docteur?
De mon point de vue, en dehors des connaissances liées à la médecine, j’attends d’un médecin qu’il soit respectueux, consciencieux, sans jugement, empathique, à l’écoute et bienveillant. Ce sont les qualités qui m’ont toujours parût importantes. Je ne sais pas si j’en demande beaucoup mais cela me paraît être le minimum pour un médecin ou un quelconque professionnel soignant.
Commençons donc par le premier à qui j’ai eu à faire. Mon médecin généraliste, me suivant depuis le début de mon adolescence. Depuis un peu trop longtemps à mon goût. J’ai constaté que son travail s’est grandement appauvri dès le moment où je suis devenue adulte. Je m’en suis aperçue lorsque mes manifestations digestives ont commencé à prendre une ampleur incontrôlables. Je suis venue le voir à plusieurs reprises. Selon lui, il était normal d’avoir une « gastro-entérite » toutes les semaines. Puis tous les deux jours. «Vous savez, vous travaillez avec des enfants, il y a constamment des virus». Résumons, j’étais malade de manière quotidienne et je venais le voir de façon récurrente pour m’amuser? En plus, c’est moi qui paie la consultation, et je ne suis pas riche. C’était comme si, être une jeune adulte ne m’offrait pas la possibilité d’être malade d’autre chose que d’un virus car trop jeune pour être crédible? Je ne comprends toujours pas comment il pouvait traduire: «Je fais caca toutes les heures de toutes les couleurs » en «Vous avez juste une gastro, pour la millième fois». Désolé pour l’image. J’aurais plein de termes à vous dire à ce propos quand j’y repense mais ça tournerait à l’acharnement. Il m’a fallut plusieurs mois pour le convaincre de m’envoyer voir un spécialiste et pouvoir mettre une étiquette sur ce que je vivais.
Auparavant, je n’avais jamais constaté cette manière si étrange de me soigner. Comme si, lorsque la situation était un peu plus complexe qu’un rhume, il préfèrait prétendre à un rhume. C’est plus facile de me soigner d’un rhume, c’est dans ses cordes, c’est rapide. Dommage. Je m’étais promise de changer de médecin par la suite. Et figurez-vous que je ne l’ai pas fait, par fainéantise. Et surtout, je me croyais débarrassée pour un moment des rendez-vous médicaux. Grossière erreur! Alors, si jamais vous n’êtes pas satisfait de la personne qui vous suit sur le plan médical, changez. N’attendez pas.
Lorsque tout a commencé, malgré mes nombreuses alertes, le scénario catastrophe se répètait. Il m’a fallut des mois de souffrances pour enfin prétendre à une réelle aide.
La question que j’anticipe est la suivante: Pourquoi ne pas changer de médecin en cours de diagnostique? J’ai plusieurs pistes à partager. Il est important de rappeler qu’au commencement de cette histoire, je n’avais pas prévu les proportions qu’elle prendrait. Je ne suis pas madame Irma. Il m’était impossible d’imaginer qu’il me fallait un allier solide dès le début. Ce généraliste avait toujours plus ou moins, “fait l’affaire” pour le reste.
A l’instant où j’ai conclu, amèrement, qu’un autre soignant serait une bonne idée, entraient en jeux d’autres aspects.
Premièrement, l’urgence de mon état se dégradant et ne me permettant pas de me passer de médecin. Obligée de continuer de le côtoyer par besoin.
L’un des autres facteurs est qu’il n’est pas simple de trouver un bon médecin. Il ne suffit pas de le vouloir de toutes ses forces pour devenir son patient. Les procédures sont longues et sans garanties de trouver mieux du premier coup. C’est un peu comme trouver la perle rare. Et, il faut juger le praticien très rapidement, sur un rendez-vous pour savoir s’il va nous correspondre et être ce coéquipier dont on a tant besoin. Ce n’est donc pas une mince affaire.
De plus, il faut prendre en compte l’égo du monde médical. Avouer à mon généraliste qu’il ne me convenait plus, c’était délicat. Dans un monde idéal, je n’aurais pas dû avoir peur de le dire mais j’avais une part d’appréhension. Fondée ou pas, j’avais peur que lui dire, signerait potentiellement l’arrêt des soins qu’ils pourraient me prodiguer. Certes, un médecin se doit d’être impartial mais ça reste un humain. La confiance serait en quelques sortes brisées et s’il avait déjà du mal à me prendre au sérieux, ça n’aurait pas été en s’arrangeant. Il pourrait se sentir attaqué. Comme si je remettais en cause ses compétences. Je suis convaincue qu’il travaille bien mais l’humain n’est pas parfait. Et au final, je pensais sincèrement qu’il ne me correspondait pas.
Une fois, mon état en constante baisse, j’ai rassemblé de l’énergie et ai pris en secret, un rendez-vous avec un autre docteur. Un peu au hasard. Les bons médecins, soit, ils ne prennent plus de nouveaux patients, soit, il y a des mois d’attentes. Je l’ai choisi en fonction de la disponibilité qu’offrait ce nouveau cabinet dans ma ville.
Je suis sortie du rendez-vous complétement dubitative. Plus perdue que jamais. Il m’a été difficile de juger en si peu de temps s’il allait être la perle que je recherchais. À la fois, il avait été professionnel, factuel et avait posé des interrogations pertinentes. À la fois, il n’avait pas été très chaleureux. Je dirais même, presque trop froid et méthodique. Je n’ai pas eu l’impression d’être en confiance avec lui. Le feeling n’y était pas.
Quelques jours plus tard, je suis venue à la conclusion qu’il vallait mieux ne pas m’engager avec lui. S’il aurait dû devenir mon allié, je l’aurais su dès le premier instant, un peu comme le coup de foudre.
Au moins, je savais à quoi m’attendre avec mon doc actuel. J’ai conscience que j’ai le droit de prétendre à des soins de qualités. Néanmoins, vu les circonstances, il restait mon meilleur choix. Enfin surtout le moins pire.
Et figurez-vous que plus mes problèmes grandissent plus la relation change. En bien. C’est malheureux qu’il ait eu besoin de temps et de mon acharnement pour comprendre que mes nombreuses plaintes n’étaient pas des caprices pour recevoir de l’attention. J’ai l’impression d’avoir attendu de toucher le fond pour être entendue.
Désormais, il me donne de plus en plus, le sentiment d’être écouté et cesse d’être surpris par les symptômes. Il note et tente de faire de son mieux. Il propose des solutions, des pistes d’actions. Je constate bien que ma situation le dépasse mais il s’investit, avec empathie.
Je tente d’expliciter le mieux possible mes symptômes, de ne pas le remettre en questions et de lui montrer mon unique but. Le même qu’à la première consultation. Je souhaite pouvoir interpréter les signaux douloureux que mon corps m’envoie et apprendre à vivre avec. Je souhaite comprendre ce qu’il m’arrive au mieux et qu’il puisse me donner des outils.
Dans un monde parfait, il n’aurait pas attendu que ma fourchette soit aussi lourde qu’un altère pour intervenir. L’important, c’est que nous avons tous la possibilité de faire mieux et de changer. Il n’y a que les cons qui ne changent pas d’avis. Que ce soit par égo ou non, il me prouve qu’il n’est pas si bête. Nous pouvons enfin avancer comme des partenaires vers le chemin d’une nouvelle homéostasie pour moi.
Afin d’amener un peu de positif, je souhaite vous parler de ma gastro-entérologue. Là, je peux affirmer, c’est une bonne professionnelle. Je suis arrivée, j’ai expliqué ce que je vivais et je n’ai pas eu besoin de la convaincre. Le simple fait de s’asseoir en face d’un docteur devrait suffire à attester que les choses ne sont pas dans la normes et qu’elles méritent une action. Avec elle, cela avait naturellement suffit. Elle a pris le temps de s’intéresser à mon dossier médical mais aussi à l’humain que j’étais. Elle s’est préoccupée de mes passions, de ma vie, de ce qui me constituait. En dehors de la sympathie dont elle a fait preuve, elle était débordante d’une empathie professionnelle. Ensemble, nous avons fait les analyses nécessaires, elle m’a expliqué mon diagnostique. Elle m’a armé d’outils afin d’apprendre à vivre avec. Elle a rempli sa mission. Elle peut rentrer chez elle, avec la certitude d’avoir agis adéquatement, selon moi. Et lorsque la situation devient à nouveau ingérable, sur le plan digestif, je sais que je peux aller la voir. Elle reste un appui sur qui compter en cas de besoin.
Je trouve malheureux de distinguer les bons des mauvais médecins pourtant, s’il y a bien un truc que ma santé m’a fait apprendre, entre autres, c’est qu’un médecin c’est pas toujours une garantie d’avoir des soins. Sauf bien sûr, si l’on est en danger imminent de mort.
Vous vous demandez, à juste titre, sur qui je vais venir casser du sucre maintenant? J’aimerais vous expliquer ma démarche. Par delà le besoin d’un endroit où transcrire mon mécontentement envers ces personnes, je souhaite vous inviter à vous poser une question. Si un médecin n’est pas correct avec vous, oseriez-vous lui dire? Ne répondez pas trop vite. Pour ma part, j’éprouve un respect pour tous les être humains et je partais du principe que ces personnes étant là pour mon bien et pour m’aider (même si ce n’est qu’une illusion), je n’ai pas ce luxe. Je ne trouve pas qu’il est commun de remettre en question le monde médical. Comme si ces personnes étaient une sorte d’humain à part entière. Et surtout, comment, moi, jeune adulte qui n’y connais pas grand chose, puis-je douter de la pratique d’un MÉDECIN!? Je n’ai pas assez de prétention et d’audace pour le faire en face et de toute manière, cela ne changerait rien de bien. C’est fou comme la société a réussi à mettre implicitement la médecine au dessus des patients. Heureusement, aujourd’hui, j’ai déconstruit cet croyance.
J’ai pu constater mon incrédibilité auprès de plusieurs docteurs, malheureusement. Ayant forcé mon généraliste à m’envoyer consulter d’autres personnes afin de pouvoir trouver ce qui n’allait pas dans mes jambes, j’ai pu rencontrer un spécialiste en angiologie. L’angiologue est celui pour qui la circulation sanguine, les veines et toutes ces choses n’ont pas de secret.
Très honnêtement, ce médecin a été correct avec moi. Je ne peux pas le nier. J’ai simplement garder une phrase qu’il m’a dite: « Mademoiselle, vous avez 24 ans, vous êtes jeune et en bonne santé, tout va bien. ». Avec le recul, je n’arrive toujours pas à comprendre la pertinence de ses dires. Il m’ôtait la légitimité d’aller mal. J’ai à nouveau une question: Pouvons nous remettre en question la douleur d’un autre? Je répondrais rapidement en disant que non. La douleur, la souffrance, le mal-être sont propre à chacun. Cela se déroule à l’intérieur, comme une guerre interne, invisible et imperceptible.
Certes, certaines techniques médicales peuvent attester que certaines choses ne tournent par rond et de là, imaginer des douleurs. Pour admettre que l’existence des ses afflictions existent, il y a toujours un patient qui témoigne et un soignant qui écoute et prend note. C’est l’ensemble des deux qui amène un résultat. Sans patient, le médecin ne soigne pas. Je me souviens très clairement, il m’avait demandé de marcher devant lui, afin de pouvoir noter une anomalie. Sa conclusion était amère dans ma bouche: «Vous marchez très bien. ». Il avait une part de vérité, je marchais normalement. Mais il pouvait se la garder, sa phrase! Le manque de tact et d’empathie sont très durs à vivre dans ce genre d’errance médicale. Ils amènent à se torturer l’esprit et se demander vivement ce qui ne tourne par rond à l’intérieur, vu que visiblement, tout va bien. Je me suis demandée plus d’une fois si je n’étais pas folle, si je n’exagérais pas, finalement.
En effet, mes douleurs sont très sournoises, certains jours, poser la plante de mon pied au sol suffit à ce que toute ma jambe se crispe. Ces jours là, afin de m’éviter ces maux, je boitais. J’ai vite compris que ce n’était pas la solution car cela me déséquilibrait la colonne vertébrale et finissait par me créer d’autres soucis. Si je peux éviter de jouer à Dr House, je le fais. Certains jours, je ne peux pas m’en empêcher. Et parfois, je serais capable de me mettre à courir. Vous avez bien lu.
Ce qui est compliqué, c’est l’après. Après, c’est la guerre dans mes membres et la cavalerie de la fatigue revient plus lourdement encore. Alors, oui Monsieur, je sais bien marcher, je ne sais juste pas comment faire pour ne plus entendre les hurlements de mes jambes. Finalement, je ne suis plus très sûre de pouvoir penser qu’il ait été correct envers moi. Il a manqué de tact et d’empathie. Je repars avec un coup au moral, mon physique défaillant et une interrogation: aurais-je dû mentir, exagérer ma démarche pour que la douleur se voit? Pourquoi ma simple parole et la vérité ne suffisent pas à être crédible?
Je vous passe les détails mais sachez qu’à chaque nouveau professionnel rencontré, j’explique méticuleusement que rien n’est visible. Il n’y a aucune déformation constatable, aucune couleur suspecte. Il suffit d’écouter mes propos et de cesser de simplement les entendre. J’entends le bruit ambiant dans la rue, j’écoute la personne me parlant. Nuance importante. C’est frustrant et oui, ça m’a beaucoup agacé.
J’ai eu le même genre d’expérience en rencontrant un neurologue, quelques mois plus tard. En effet, lors de l’entretien avec celui-ci, il posait des questions ciblées mais ne me laissait pas le temps de terminer mes réponses. Cela ne partait pas de la bonne manière. Je me suis dit qu’il devait être pressé. Pourquoi j’essayais de lui trouver des excuses. Bonne question. J’ai eu le droit au fameux moment où je dois montrer que je sais marcher. Il m’a dit sensiblement la même chose que le précédent. Sans aucun ménagement, sans laisser entendre que quelque chose existait tout de même. Ça ne se voit pas, ça n’est donc pas réel. Ça fait plaisir! Ils pensent que mon but ultime est de rencontrer tous les professionnels de la santé possibles pour des autographes? Je me passerais de dilapider mon salaire ainsi que mon temps et mon énergie. Je préférerais être entrain de courir, voyager et rire comme avant.
Le plus terrible dans cette histoire, c’est que ce neurologue a non seulement manqué de tact dans ces paroles mais aussi dans ces gestes. À tel point qu’il m’a fait subir un examen tout en me laissant une jolie cicatrice. En effet, il devait procéder à un examen appelé éléctromyogramme. Pour faire simple, cet examen permet de détecter des pathologies neurologiques par le biais d’aiguille dans lesquelles du courant électrique passe. Je vous rassure, ça peut paraître barbare mais ça ne l’état pas tant que ça. En revanche, il a été barbare. J’avais le sentiment de lui faire perdre un temps précieux et il me le faisait sentir par sa nonchalance et son manque d’attention sur ce qu’il faisait. Je vais vous passer les détails mais avant de piquer une zone, il anésthésiait avec du froid. Il était tellement dans la lune qu’au lieu d’anesthésier, il m’a brûlé. Je ne l’ai pas senti directement, pourtant, à un moment, il est resté bien plus longtemps que sur les autres endroits. Sortie de la consultation, très vite, j’ai constaté une brûlure à vif de dix centimètres de diamètres. Un barbare, je vous avais prévenu. Donc il m’avait mal parlé, maltraitée et j’avoue, je ne savais pas comment agir. Et je n’ai rien dit. Encore aujourd’hui, j’ai une cicatrice ronde sur le mollet. Néanmoins, je me suis promise que la prochaine fois qu’une situation comme celle-ci se présente, je ne me tairais pas. Pas une seconde.
Après ce fameux rendez-vous en neurologie, je fus dirigée vers le centre universitaire hospitalier de ma ville afin d’effectuer une biopsie musculaire. C’est le genre de terme que j’entendais dans les séries. Grossièrement, ils pratiquent une petite intervention pour couper un bout de viande du muscle et l’analyser. Le neurologue m’avait assuré que c’était une bonne idée. J’ai passé 3 semaines à être envoyé d’un service à l’autre. Le système administratif me bloquant la route. J’étais jamais au bon service pour prendre mon rendez-vous, puis lorsque c’était le bon, il m’indiquait qu’avant cet examen, il fallait faire un bilan neurologique. Petit rappel, j’ai été envoyé vers ce centre à la suite d’un bilan neurologique. L’ironie, vous connaissez? J’avais envie d’insulter la personne que j’avais au bout du fil. Je savais qu’elle n’y pouvait rien. Mes chances de découvrir ce qu’il m’arrivait étaient en jeu. Je passais des après-midis à appeler toute les quinze minutes afin de tomber sur leur répondeur. La musique n’était pas agréable et au bout de quatre minutes, cela raccrochait. J’ai compté, pendant une semaine, j’ai appelé soixante-deux fois. Vendredi matin, à la soixante-troisième fois, j’ai eu une voix humaine. JE N’Y CROYAIS PLUS. Finalement après de dures négociations entre plusieurs interlocutrices, j’agendais un rendez-vous. Pas pour une biopsie. Je vous passe les détails, un blabla entre l’administratif, la cheffe de clinique et l’incompréhension. J’avais donc enfin un rendez-vous en poche, dans trois mois.
Parlons-en des délais. Je sais que je ne suis pas à l’article de la mort. Je sais qu’il y a des cas bien plus grave que le mien. Je ne comprends tout de même pas comment mon médecin généraliste, connaissant les attentes à rallonges des spécialistes, n’a pas jugé bon de planifier plusieurs recherches au même temps. Toujours la même rengaine. Je force pour faire des recherches. Il finit par céder. Puis m’explique que nous allons attendre d’avoir les résultats pour en faire d’autres. Qu’est-ce que ça lui coûtait de m’envoyer faire plusieurs batteries de tests à la fois? J’aurais pu protester et faire un scandale. Ce qu’il se passe dans ce genre de moment c’est qu’il tourne les phrases d’une manière où accepter est obligatoire. Ces dires paraissent être les uniques clés. Je pourrais qualifier ces pratiques de manipulatoires. Sur l’instant même, je ne comprends pas que je suis entrain de me faire entuber. Il est fort, il utilise un sourire faussement bienveillant. Le cerveau se fait avoir. Je sors du cabinet, contente des solutions qu’il donne. Quelques instants après, je réalise que ces solutions sont: Premièrement, prendre mon mal en patience, souffrir (il ne le dit pas bien évidemment). Deuxièmement, continuer à prendre mes petits suppléments et pour finir, il n’y a pas de solutions. C’est vicieux. Ne vous inquiétez pas, j’ai fait le nécessaire pour ne plus jamais tomber dans le panneau.
C’est fou de devoir apprendre à se surprotéger d’une personne qui est censée être la pour notre bien.
Vous l’avez compris, j’ai donc souvent été déçue par les soins. Ces personnes ont sûrement leurs raisons. Au fond de moi, il devait y avoir plusieurs croyances faussées. Je pensais pouvoir accorder une confiance aveugle aux docteurs. J’avais toujours appris que les toubib, ça soigne les bobos, c’est là pour le bien. J’étais en torts. Autrefois, je considérais qu’être soignée était facile. Je savais que guérir n’était pas simple et est souvent associé à un combat permanent. De ces expériences, j’apprends à mes dépends que pour être soignée, il va falloir que je me batte autant que pour guérir. En plus de devoir trouver ce qui n’allait pas, je devais me battre pour ça.
Jamais je n’aurais imaginer devoir me battre pour survivre, pour tenir debout et surtout, me battre pour trouver ce qui me flinguait.
PS: Si tu observes de grosses fautes d’orthographes, très vilaines, n’hésite pas à me le dire! Je te remercie de tout mon coeur de me lire et promis, la suite arrive bientôt!