Récit de vie – 4. Carnet de santé

Avant de lire ce qui suit, je te propose, si tu ne l’as pas déjà lu, d’aller jeter un oeil aux chapitres précédents.

Chapitre 1 – Ma vie d’avant

Chapitre 2 – La première fois

Chapitre 3 – Le déni

Bonne lecture!

PS: J’ai beaucoup hésité à partager tout ces détails. Néanmoins, je crois qu’ils peuvent finalement réellement t’aider à te mettre dans mes chaussures et comprendre comment j’ai vécu les épreuves que je te décrirais par la suite…


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Je trouve important d’aborder ma vision de la santé, avant que toute cette histoire me tombe dessus. Et plus précisément mon point de vue sur ma propre santé. Donc, de manière très chaleureuse, je vous invite à faire un saut dans mon carnet de santé. Bienvenu, installez-vous. Servez-vous un thé, un café, ce que vous voulez. Je veux que vous soyez à l’aise durant ce bilan.

C’est parti.

Je suis née avec de l’eczéma sur une bonne moitié de mon corps. Si vous ne savez pas ce que c’est, c’est une maladie qui touche la peau. Pour vous la décrire de mon point de vue, je trouve que l’étymologie du mot fait bien le travail. Cela viendrait du grec et la traduction serait entre l’ébullition et bouillir. Je pense que vous avez compris la métaphore. Ma peau est similaire à l’eau chaude, dans la casserole, juste avant d’y plonger une poignée de pâtes.

Et ce depuis toujours. À certaine période, la maladie se fait discrète. À d’autres moments, j’ai été privée de baignade à la piscine car le chlore est trop agressif. Pas tous les jours évident et encore aujourd’hui, j’apprends à partager mon corps avec. Néanmoins, je ne me suis jamais sentie gênée par les poussées. Je n’ai rien connu d’autre, à vrai dire. J’ai appris à composer avec les caprices de ma barrière cutanée et n’ai jamais eu la sensation d’être très différente des autres.

La deuxième chose avec laquelle j’ai toujours plus ou moins vécu c’est une digestion capricieuse. Beaucoup de maux de ventre, et de troubles intestinaux divers et variés. Et là aussi, c’était tellement normal pour moi que je n’avais pas conscience de ce qu’était une normalité digestive, si je peux dire ça ainsi.

Je m’étais accoutumée aux caprices de mes viscères. Surtout qu’il faut avouer que dans notre société, parler problèmes digestifs, c’est pas beau, ça se fait pas. Alors je n’ai jamais eu l’occasion de me rendre compte que quelque chose clochait, ou alors, je ne voulais pas voir… Qui-sait?

Néanmoins, quelques mois avant que la maladie ramène sa valise, j’ai vécu une grande peur. J’étais en vacances, avec des amis, au ski. Et ma digestion a déclaré la guerre, enfin plus que d’habitude. Je vous passe les détails les plus adorables mais j’ai réellement cru que mes organes ne fonctionnaient plus. J’ai eu l’impression de mourir alors j’en ai parlé autour de moi. C’est ainsi que j’ai compris que je n’avais jamais eu un système dans la norme.

J’en suis arrivée à ne plus savoir quoi manger. Rien ne convenait à mon corps. Moi qui avait toujours apprécié manger, je redoutais maintenant le moment d’avaler un morceau. C’était devenu autant inquiétant pour moi et mes proches qui voyait mon corps s’amincir.

C’est alors que, je suis allée chercher de l’aide. Je me suis dirigée vers une gastro-entérologue, dont je garde un bon souvenir. Après analyses, elle m’a appris que j’avais le syndrome de l’intestin irritable, ou bien le syndrome du côlon irritable et en anglais ça donne, irritative bowel syndrome. C’est reparti pour le cours de science. Je vais vous la faire courte: c’est une affection chronique qui implique des désagréments digestifs variables et propre à chaque personne. Les crises sont déclenchées par le stress, les vêtements trop serrés, l’alimentation et des fois pour rien. Une pépite.

J’ai ressenti énormément de soulagement avec ce diagnostique. En effet, il me permettrait de pouvoir enfin trouver un peu de répit. Et ça expliquait tellement de choses. J’étais tellement contente de comprendre mieux le fonctionnement de mon corps et de savoir comment répondre à mes besoins. Pour m’aider, j’ai deux traitements quotidiens. Le premier est médicamenteux tandis que le second, c’est mon alimentation. J’ai tout changé. C’est un peu strict comme mode d’alimentation mais néanmoins, il me permet de gérer un peu mieux les crises. C’est pas magique mais je vis bien mieux que depuis toujours, de ce côté-là en tout cas. Alors bon, je ne suis pas la bonne personne à qui offrir des chocolats ou à inviter à dîner mais ce n’est pas bien grave. L’équilibre retrouvé est un pur bonheur.

Et comme nous sommes dans le sujet des restrictions, je vous annonce que j’ai un joli terrain. Allergique, bien évidemment. Aussi vaste qu’un champ! Des chats aux acariens, les pollens, en passant par les fruits de mer, les oléagineux ainsi qu’à qu’à la plus part des fruits et des légumes présents sur votre liste de courses, le samedi matin. 

Le débat n’est pas de savoir s’il y a un dieu* ou pas quelque part, la vraie question est: si quelqu’un joue avec les humains sur la terre comme je joue au sims. Cette personne a dû penser que je manquais de défis. Quelle belle idée. Parce que je dois vous avouer que lors de mon changement d’alimentation, ça n’a pas été simple d’enlever encore une part de ce que je pouvais manger. Aujourd’hui, je m’en accommode plus facilement, mais ça été un réel apprentissage.

En tout cas, malgré tout ce bagage, je me pensais en bonne santé. De mon point de vue, tant que je pouvais rire, courir, sauter et sourire: tout allait bien. Finalement, je me suis toujours adaptée. Alors oui, j’ai plus de difficultés à faire mes repas au vu de mon estomac et des allergies mais j’aiguise ma créativité culinaire. Les possibilités sont infinies! J’ai toujours accepté les défis que la vie me réservait et chaque jour, je les relevais, sans broncher… Enfin, c’était avant tout ça, vous vous en doutez.

Je pense que désormais, vous avez une belle image de ma santé. J’insiste sur un seul point. Certes, j’ai toutes ces affections mais, au delà de ça, je me sentais bien. Une jeune adulte en plein apprentissage de la vie. Je considérais réellement ma santé comme bonne. Je savais vivre avec tout ce petit monde et même si parfois, nous avions des querelles, cela se passait bien. Je me sentais libre.

Les moments les plus désagréables, c’était surtout dû au regard des autres. Malheureusement, j’ai souvent pu entendre de la stupéfaction et de la pitié. Et je ne compte pas le nombre de: «Je ne sais pas comment tu fais». La réponse magique que je n’ose jamais donner par respect est que si je ne le fais pas, je ne survis pas. C’est aussi simple. Et je n’ai surtout pas le choix. J’espère que tu n’as pas ressenti de malaise ou de pitié, car ils n’ont pas lieu d’être.

Alors s’il te plaît, je t’ai laissé rentré dans l’intimité de mon dossier de santé, je te prie de ne pas le juger. Garde à l’esprit que j’avais tout pour mener une vie heureuse, comme j’ai pu te la décrire auparavant.

Vous avez remarqué? Je n’ai tellement pas l’habitude de déballer tous ces détails que je me suis permise de vous tutoyer, comme si nous étions devenus intime. Navrée.

Maintenant que tu vous savez d’où je viens, en terme de santé, nous pouvons avancer vers la destination finale.

*Je tiens à préciser que je ne veux offenser personne et que si c’est le cas, je m’en excuses. La question de la religion reste propre à chacun et je n’émets aucun jugement.


PS: Je te remercie de me lire et promis, la suite arrive bientôt!

Récit de vie – 3. Le déni

Avant de lire ce qui suit, je te propose, si tu ne l’as pas déjà lu, d’aller jeter un oeil aux chapitres précédents.

Chapitre 1 – Ma vie d’avant

Chapitre 2 – La première fois

Bonne lecture!


Reprenons au moment où je me repose, entre juillet et août 2019. Je m’attends à être vite sur pieds, comme après un petit rhume.

J’ai donné ma lettre de démission dans mon travail actuel depuis quelques temps et en réaction de cette nouvelle, mon employeur instaure une ambiance malsaine vis-à-vis des arrêts maladies. En effet, une pression psychologique est constante. Lors d’une maladie, de manière dissimulée, il nous est demandé de ne pas être malade. C’est si simple, pourquoi n’y avais-je jamais penser. Sans plaisanterie, le seul but de mon ancien employeur était le profit au détriment de l’humain fournissant le travail. Sachant tout cela, vous ne serrez pas surpris d’apprendre qu’après ma petite balade aux urgences, je n’ai pas eu la possibilité de me rétablir correctement. Et maintenant que j’y repense, ce mode de fonctionnement bien étrange n’était pas nouveau. Je ne l’avais simplement jamais vraiment expérimenté.

Je devais terminer cet emploi tout en formant mon remplaçant. Malgré cette ambiance plus que toxique, je me sentais légère car je savais que je quittais ce lieu. Leurs manière d’agir ne m’atteignait qu’en surface. J’étais imperméable à leur négativité et j’avais confiance en l’avenir. Et pendant ce temps, je gardais en séquelle quelques petites douleurs au niveau du mollet. Je pensais clairement que je manquais simplement d’encore un peu de repos pour me rétablir et qu’il était donc normal d’avoir mal. J’avais la conviction d’avoir récupéré en grande partie, tout en gardant encore quelques plaies plus longues à cicatriser. J’ai instinctivement mis de côté la course à pied tout en gardant le reste de ma vie et de mes activités inchangées.

J’avais des vacances à prendre, avant de quitter cette entreprise. J’en ai bien profité pour ralentir le rythme et me suis rendues au bord de la mer avec mon frère et mes parents. Mon frère m’a donné un surnom tout à fait charmant: Dr House. J’ai boité et marché lentement durant toutes les vacances. Ma famille ne m’avait jamais vue comme ça et avaient parfois du mal à comprendre ma faiblesse, mes douleurs et ce malgré la médication. J’ai parfois dû refuser certaines activités car je ne m’en sentais pas capable et je me disais que dans ma situation, j’avais simplement besoin de ne pas forcer. Le repos m’aiderait à guérir. Je garde un superbe souvenir de ces vacances, malgré mes nombreuses difficultés. J’étais intiment convaincue que j’étais entrain de me rétablir. Je chérissais mon corps de m’avoir permis tant de choses et lui offrait dès que possible du répit.

Et le grand jour arriva. Mon premier jour dans le nouveau poste.

J’étais aux anges. J’appréciais autant le cadre que la directrice ainsi que mes collègues. Je me voyais déjà m’épanouir dans mon poste. Etant donné que c’était l’été, après deux semaines de travail, la crèche fermait, pour les vacances annuelles. Ça tombait bien, si vous voulez mon avis. Trois semaines de plus pour me requinquer, c’était idéal.

Durant la première, j’ai profité de ma famille et de mes amis puis j’ai rejoins mon compagnon. À l’époque, Il habitait dans une jolie maison de campagne, avec un grand jardin, ses parents et leurs animaux. Malheureusement, nos vacances n’étaient pas synchronisées et il devait aller travailler. J’ai profité de ces deux semaines comme si j’étais partie à une retraite de yoga. Je me laissais dormir, puis je pratiquais quelques étirements et j’allais finalement me prélasser au soleil, une lecture à la main. Je vivais au ralenti, en douceur. Autrement dit, du repos, du repos et du repos. À la fin de ce long congé, je rentrais chez moi, avec la certitude d’être presque guérie. Je pouvais à nouveau me mettre sur la pointe des pieds. J’en sautillais précautionneusement de joie.

Et la rentrée est naturellement arrivée.

Plus les jours passaient, plus je tissais des liens avec mes collègues et je m’acclimatais à cette nouvelle ambiance professionnelle. J’apprenais à connaître les enfants et leurs parents et exerçait mon travail avec un plaisir grandissant. Chaque jour avait sa propre dynamique en fonction des petits et des mes collègues et chaque jours, je rentrais à la maison avec la satisfaction de bien faire les choses. J’avais le sentiment d’avoir enfin trouver ma place professionnellement parlant. Le cadre de travail était bienveillant et stimulant, je n’en demandais pas plus pour m’épanouir.

Chaque jour aussi, une petite graine de douleur reprenait sa place dans mon mollet, à commencer par le côté droite. Chaque jour, elle germait de plus belle. Et ce sans m’en rendre réellement compte. J’appliquais la méthode de l’autruche, en accordant qu’une minime attention aux signaux que mon corps m’envoyait.

Rappelons que d’un point de vue professionnel, je sortais d’un poste où l’on jette les gens une fois usés alors je gardais la crainte de montrer à mon équipe ma faiblesse naissante. Faiblesse dont je n’avais pas encore réellement conscience non plus. En effet, mentalement, j’étais persuadée que l’aventure du week-end de mai 2019 était de l’histoire ancienne. J’étais aussi vive et dynamique que je le pouvais. Je proposais des balades en poussette aux petits quotidiennement et me donnait à fond. Mon intégration dans l’équipe s’est fait naturellement et rapidement. En parallèle, je pratiquais à nouveau le yoga et je tentais de passer mon permis de conduire.

Je n’osais pas regarder la verité en face. J’étais en plein déni mais la vie était belle avec ses couleurs de fin d’été.


PS: Je te remercie de me lire et promis, la suite arrive bientôt!

Lili

Récit de vie – 2. La première fois

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Avant de lire ce qui suit, je te propose, si tu ne l’as pas déjà lu, d’aller jeter un oeil aux chapitres précédents.

Chapitre 1 – Ma vie d’avant


Maintenant que vous avez le contexte, il est peut-être temps d’entrer dans le vif du sujet, à savoir, comment cela a commencé. Je menais la vie dont je vous ai parlé. J’étais confortable. J’avais quitté le nid familial depuis plus d’une année, j’avais un chez moi douillet, je préparais une course de dix kilomètres dans ma ville, un chéri, une famille, des amis, bref. Tout allait bien, un long fleuve tranquille se préparant dans l’ombre, en torrent. 

Seule ombre au tableau, je changeais de lieu de travail. En effet, je n’étais plus en accord avec les valeurs de mon ancienne direction. Soleil dans le tableau, j’avais trouvé une place vacante, qui me semblait parfaite. Donc un changement professionnel, certes, mais plutôt maîtrisé et voulu.

Trois semaines après ma fameuse course, la maladie ramenait sa valise pour établir une colocation. Sans mon consentement préalable. Sans que je ne l’aperçoive, elle et ses cartons.

C’était un samedi soir, banal. J’ai toujours la date en tête, le week-end du 25 et 26 mai 2019. J’avais passé une journée au bord du lac, avec une amie puis je m’étais préparé un repas pour finalement m’installer devant mon ordinateur. J’allais jouer aux jeux vidéos, merci frérot. Après quelques parties, j’ai ressenti le besoin de me rendre au toilette. À ma grande surprise, je ressentais des douleurs dans les deux jambes. De manière diffuse, entre la crampe et la courbature. Une drôle de peinture. Je n’ai pas été affolée par la situation. J’ai simplement pris l’initiative d’avaler un anti-douleurs et me suis vite rassurée. Une nuit de sommeil et l’affaire serait vite oubliée. Je m’étais bien remise de ma dernière course et j’étais globalement en bonne forme.

Mauvaise surprise: l’affaire a continué.

Le lendemain matin, à mon réveil, je suis simplement tombée de mon lit. Encore dans le coton du sommeil, je n’avais pas présagé qu’au moment où j’allais mettre mon poids sur mes jambes pour me lever, mes jambes allaient… prendre leurs jambes à leur cou. C’est arrivé très vite. Je me réveille. Je me mets debout. Échec. Douleurs. Incompréhension. Deuxième tentative en me tenant aux murs et meubles. Douleurs, douleurs, douleurs. Sans tomber cette fois-ci. Mon objectif: me rendre au petit coin. Je m’effectue, tant bien que mal. Après ma petite affaire, je retourne péniblement dans mon lit, comprenant que les problèmes de la veille ne se sont de loin pas réglés et même pire, ils ont empiré. Je n’ai pas perdu de sensations dans mes jambes, c’était même plutôt tout l’inverse. De mes orteils jusqu’en haut de mes cuisses, tous mes muscles étaient tellement crispés que j’avais deux bâtons bien rigides à la place des jambes. Lorsque je souhaitais plier mes genoux, l’effort était tellement conséquent que mes muscles lâchaient pour me faire atterrir au sol. Tous mes mouvements étaient entravés et fastidieux.

Ni une ni deux, j’ai avalé un fruit, me suis habillée tant bien que mal et direction les urgences, péniblement.

Je vous passe les détails de l’attente, un dimanche aux services des urgences hospitalières et je passe directement au verdict. Finalement, pas vraiment de verdict. Et spoiler alert: C’est le premier d’une longue lignée. Le médecin que j’ai vu m’a expliqué qu’il ne pouvait pas dire ce qu’il m’arrivait. Malgré les prises de sang et autres tests. Il pouvait constater que mes muscles des deux jambes étaient contracturés des orteils aux cuisses. Il ne pouvait pas dire pourquoi. La seule supposition qu’il m’ait laissé était qu’ayant des troubles digestifs, il était possible que j’aie des carences, dont en magnésium. Je suis donc rentrée bredouille ou plutôt clopin-clopant avec mon magnésium et des antidouleurs sous le bras. Et bien évidemment quelques minces jours de repos et sans que je le sache, accompagnée de ma nouvelle colocataire.

Je dois souligner que je parle d’elle comme d’une colocataire, mais à ce moment-là, j’avais simplement le sentiment de m’être blessée, de manière banale et que j’allais me soigner. Qu’il y avait un problème et une solution. J’imaginais encore que j’étais comme invisible, que tous les bobos avaient un remède.

Dès ce jour-là, nous pourrions plutôt comparer ma colocataire à une personne malveillante tapie dans l’ombre de ma vie.


PS: Je te remercie de me lire et promis, la suite arrive bientôt!

Jour 79 – Aller de l’avant

Je m’éveille, sereinement. Mon corps me paraît reposé mais un détail attire mon attention. Ça vient de mes yeux. À peine je les ouvre qu’ils brûlent. Malgré les gouttes de la veille, le sommeil et les paupières closes, ils sont en feu.

Je me lève malgré tout, pensant qu’après encore quelques gouttes, cela passera. Je prépare une tisane, une fournée de yoghourt qui seront prêts dans une dizaine d’heures et me voilà partie vers le salon.

Mon tapis de yoga m’attendait. Ce matin, je suis une vidéo d’Adriene. La séance commence en douceur, réveillant mon corps et faisant taire les sensations désagréables. Puis, les postures s’enchaînent et s’intensifient. Je ne vois pas l’heure passer. Je me sens pleinement centrée et prête à profiter de cette magnifique journée.

Je vais me préparer un petit déjeuner et ensuite, je décide d’écrire. J’aimerais terminer l’article pour pouvoir le publier mais c’est sans compter mes yeux. Ils se rebellent et s’immolent. Je sors ma panoplie de gouttes et collyres mais rien n’y fait. Alors, je pose rapidement mes mots, le strict minimum, je ne relis même pas et j’abandonne. C’est trop douloureux et impossible d’écrire les yeux fermés.

Je tente d’aller préparer des compresses chaudes que je dépose délicatement sur mes paupières. Puis, j’instille encore une goutte dans chaque oeil et vais m’installer dans le canapé. J’ai l’impression que l’astuce des compresses a fonctionné. Je retrouve un confort mais de courte durée. Quel calvaire.

J’ai souvent les yeux secs, qui me brûlent, tirent et j’en passe. Pourtant, une crise aussi forte, dès le réveil, je n’en avais jamais connue. Ce n’est même pas une histoire de fatigue car je me sens en pleine forme. La situation est un peu rageante mais malgré tout, je fais preuve d’un calme olympien. Autrefois, je me serais peut-être énervée contre ce corps détraqué. Mais, à l’heure actuelle, j’ai appris à accepter les aléas de ce quotidien pas comme les autres. Il me demande de me réinventer chaque jour. Comme si chaque jour, j’avais un nouveau corps avec de nouvelles conditions. Instinctivement, désormais, je ne me lamente plus mais je vais directement vers les solutions. Je vais de l’avant.

Dehors, j’aperçois la grisaille et même si le soleil est caché sous une épaisse couche de nuage, je n’en peux plus d’avoir les yeux ouverts. Je les ferme à la moindre occasion et les plisse. Et soudainement, une idée un peu surprenante me vient en tête. Et si je remplace mes lunettes de vue par mes lunettes de soleil, j’aurais moins de luminosité, ça sera ça de gagné. Un peu honteuse d’en arriver à cette idée, je pars chercher mes lunettes. Le soulagement est immédiat. Mes yeux restent inconfortables mais je peux désormais les ouvrir un peu plus longtemps.

Avec ce sens entravé, je vais passer une partie de la journée à écouter des podcasts. J’avais envie de coudre, de regarder des films et d’écrire mais je remets à plus tard. Je n’ai pas spécialement le choix mais ce n’est pas l’important.

Au moment de me cuisiner une soupe, je dois admettre que c’est comique. Je ferme souvent longuement les yeux, pour apaiser le mal mais je ne suis pas sûre de maîtriser ma cuisine les yeux fermés. Et c’est à ce moment précis que je me rends compte le fabuleux travail que font mes yeux. Malgré les difficultés d’aujourd’hui, je les chéris et estime pleinement toute la chance que j’ai d’en avoir encore l’utilisation. Je les remercie mille fois, dans ce moment délicat et leur envoie tout mon amour. J’ai une pensée d’admiration (est-ce que je peux me permettre de le penser et de l’écrire?!) envers toutes les personnes malvoyantes.

Une fois ma soupe prête, je la savoure, toujours les yeux clos. Les sensations sont différentes et j’ai toute ma conscience sur ce qui se déroule dans ma bouche. Une explosion de textures, de saveurs. Je déguste lentement mon bol.

Puis, malgré les podcasts, je rencontre un peu l’ennui. J’avais imaginé avoir une journée plus active mais je ne sais pas fonctionner sans mes yeux. J’analyse mon corps et mes possibilités et je constate que je suis pleine d’énergie. Alors, je m’habille et pars prendre l’air. Si je n’ai pas la vue, j’ai la marche.

Une fois arrivée dehors, la luminosité s’intensifie, malgré mes lunettes de soleil toujours présentes sur mon nez. Et le vent. Je n’ai pas calculé les obstacles que je pourrais rencontrer. Le vent froid souffle sous mes verres et vient limer mes pupilles. Quel supplice. Pendant quelques minutes, je songe à abandonner la promenade jusqu’à ce que je prends une ruelle que je n’avais jamais emprunté. Et surprise, le vent ne sévit pas dans cette petite rue. Alors, je continue ma route.

J’avance au hasard, en fermant soigneusement les paupière dès que je le peux. Je soulève bien mes pieds, afin de ne pas buter contre une irrégularité du sol et ainsi, je vais de l’avant. En arrivant devant cette descente, je me questionne sur mes capacités. Pour moi, ces derniers temps, le plus dur a toujours été de descendre. C’est un exercice très challengeant et la pente est sacrément raide. Je n’ai aucune idée d’où mène ce chemin verdit mais je décide de laisser le destin choisir. J’avance.

En atteignant le point le plus bas, j’atterris au milieu d’une petite forêt avec une rivière. Je n’aurais jamais imaginé tomber sur une surprise pareille. Je prends hasardeusement un cliché et reste à écouter le son de l’eau. Je clos mes paupière, accoudée à la rambarde du pont et profite de reposer mes jambes. Après la descente, il y a toujours une montée.

J’entame la monté, tout aussi raide. Plus j’avance et plus je distrais ma tête des sensations désagréables. La promenade me fait un bien fou. Ce n’est qu’au moment de rentrer, que de derrière mes lunettes de soleil, j’entrevois des contrastes dans le ciel. Je les capture, pour pouvoir mieux les admirer plus tard. Ils étaient plus spectaculaire en vrai qu’en image. Tans pis.

Par un autre chemin, je retrouve la route de la maison. Je suis soulagée d’avoir pu aller mettre mon corps en mouvements. Certes, je n’ai pas pu observer tous les détails de ma balade, comme je le fais d’habitude. Pourtant, cette fois, j’ai perçu d’autres choses. J’ai porté mon attention sur les odeurs, les sensations de chaleur et de fraîcheur ainsi que les sons m’entourant. C’était différent de d’habitude mais tout aussi riche.

Ce soir, je vais continuer mes podcasts et m’endormir paisiblement. Ce fut une belle journée malgré les difficultés rencontrées.

Jour 75 – La créativité apaise les maux

Dès que j’ouvre les yeux, quelque chose à changé. Je me lève rapidement, pressée de profiter de cette énergie nouvelle. Après deux jours à chercher le vrai repos, celui qui régénère, le voilà enfin.

Comme un missile à tête chercheuse, je me dirige tout droit sur mon tapis de yoga.

Je pratique les postures avec dévotion, malgré que mes muscles vibrent sous mon poids, je tiens bon. Ma respiration est profonde et sonore. Je m’accorde ce temps pour démarrer la journée et à la fin, lorsque je médite, je me perds dans mes pensées. je songe à tout ce que je pourrais faire de cette journée et à toute ces possibilité qui s’ouvrent devant moi.

Je vais commencer par écrire, remettre au propre mes textes, le tout en avalant mon petit déjeuner.

Puis, je me prépare et sort, j’ai un rendez-vous chez ma thérapeute. Mes pas sont légers, la sensation de déplacement est agréable. En sortant de la séance, je vais chercher une belle brioche (adaptée à mes restrictions, youpi!) à la boulangerie. J’avance d’un pas décidé en destination de chez moi.

Il est bientôt midi donc je me rends en cuisine. J’ai en tête de préparer une recette de pâte à tartiner maison, afin d’accompagner ma brioche, pour le goûter. Pendant que je fais la recette, des douleurs s’éveille dans mes deux jambes. J’alterne les positions et tente de ne pas me focaliser sur le mal. Malgré mes efforts, il devient difficile de tenir debout. Je me dépêche de finir mes préparations et vais m’installer pour manger.

Pendant que je mange mon repas, une armada de douleurs plus vives et désagréables les unes que les autres, débarquent. je ne sais plus comment me tenir pour ne rien ressentir. J’admets, qu’à ce moment précis, j’ai l’impression que ma journée est terminée. Un peu résignée, je vais chercher des anti-douleurs, sans grands espoirs ainsi qu’une bouillotte sèche et vais m’allonger. Je lis quelques pages puis j’octroie la fermeture de mes paupières.

Lorsque j’ouvre les yeux, ce qui m’interpelle c’est ce son continu, en fond. Il n’était pas là lorsque je me suis assoupie. Je me retourne afin de pouvoir observer la fenêtre et identifie la provenance de cette douce mélodie. La pluie est battante et la vitre est assailli d’une multitude des gouttes épaisses. Le spectacle est reposant. Il m’inciterait presque à fermer un peu plus les yeux, enveloppé dans cet environnement réconfortant.

Je scanne les sensations et j’ai l’impression que le mal s’est en allé, me laissant un peu de répit. Ni une, ni deux, je me lève. Je ne sais pas jusqu’à quand ça va tenir cette fois-ci, alors je fonce. J’ai terriblement envie de peindre depuis plusieurs jours. À savoir que si je pouvais, je peindrais bien plus souvent mais cette activité demande beaucoup. Entre la préparation de l’atelier, le rangement de celui-ci, ainsi que le nettoyage des outils et sans compter le fait de peindre tout court. Ces choses peuvent sembler bête, de les compter, mais de mon point de vue, je dois calculer chaque acte afin d’évaluer ma propre énergie. Aujourd’hui, j’admets que je suis encore sous l’effet de ma sieste et des anti-douleurs. Ça ne durera pas éternellement, alors je saisis ma chance. Au passage, je me prends un petit goûté, ma fameuse brioche avec la pâte à tartiner. Un petit régal mais je ne m’attarde pas, je n’ai pas que ça à faire!

J’installe mon matériel, les protections et me voilà, face à ma première toile blanche. Je choisis les teintes et commence à imaginer le procédé. La bulle se forme et s’épaissit autour de moi.

Ma première toile donne un résultat dont je ne suis pas déçue mais elle renferme une histoire. J’ai eu beaucoup de mal à doser les couleurs, les apposer comme je le souhaitais. Jusqu’à la dernière minute, le processus a été chaotique. D’ailleurs, au moment où je l’ai mise à sécher, je n’étais pas encore convaincue. Et finalement, en la laissant de côté, la peinture à continuer à travailler et a révéler sa magie.

Puis, je reprends les teintes de bleus mais décide de prendre du cuivré pour l’agrémenter. Je ne saurais décrire ma passion pour ce jeu de couleurs. Je peux juste dire qu’elle me font vibrer. Je suis hypnotisée par chacune d’entre elles.

J’entame alors ma seconde toile. Le processus est apaisant, aspirant et plein d’incertitudes. Malgré tout, j’ai confiance. Peut importe le résultat, le chemin pour y parvenir est nourrissant. C’est une expérience nouvelle à chaque toile. Comme si c’était la première fois.

Dans ma bulle, il n’y a rien que les couleurs, le bonheur de créer et moi. En commençant cette troisième toile, je penses aux infinités de résultats possibles et me perds dans ce songe. Prise dans la spirale créative, je me laisse porter jusqu’au moment où je ressens que la toile est complète.

Je ne peux pas continuer à faire la sourde oreille. C’est ma dernière toile pour aujourd’hui. En effet, mon corps crie de plus en plus fort. Il me supplie d’arrêter tous mouvements. Il m’implore de l’écouter, de regarder sa souffrance en face. Les douleurs ont reprit depuis un moment, mais portée par la créativité, je n’ai rien vu. Si tôt je ferme les pots de peinture que je suis vivement assaillie par une force me tirant vers le sol. Étant recouverte de peinture, je ne veux rien salir, alors je m’allonge sur le parquet, pour attendre que ça passe. Je reste ainsi de longues minutes et je réunis tous les bouts de moi afin de me relever. Là, c’est bon, c’est officiel. J’ai mal. Je capitule, je plie n’importe comment les affaires et vais m’engouffrer dans la douche. Frotter la peinture est douloureux, je n’en ai pas la force. Je n’ai même pas la force de tenir debout. Je m’asseye, sous l’eau chaude. Mon estomac rejoint la danse et se noue de toutes ces forces. C’est une mutinerie.

Peu sûre de mes pieds, je sors de la douche et vais m’allonger, encore. J’entoure la bouillotte de tout mon corps, recherchant cette chaleur calmante.

Ce soir, je ne fais plus rien. Je laisse mes proches s’occuper de la vie. Je vais me coucher, les yeux encore pleins d’étoiles. Tellement heureuse d’avoir pu peindre et vivre une journée si remplie. Peut importe le prix que je paie à l’heure actuelle, ça valait le coût.

Jour 72 – Hommage

Photo de Sam Kolder sur Pexels.com

C’est un jour particulier. Il commence par une grasse matinée, un fait plutôt inhabituel. J’avais sûrement besoin d’un peu plus de sommeil que d’habitude. Puis, je me lève avec l’envie de prendre le temps d’émerger. Je commence par lire les nouvelles, dans le journal. Et c’est à ce moment-là que je ressens un déchirement. J’apprends le décès d’une jeune femme connue, atteinte de deux maladies rares dont une, la même que la mienne. Elle s’appelait Faustine Nogherotto.

Vous vous en êtes aperçu, je parle souvent d’elle, ma colocataire. Elle rythme mon quotidien, malgré moi. Je ne veux pas être réduite à son étiquette, c’est pour ça que j’ai fait le choix, jusqu’ici, de ne pas réellement mentionner son nom. Pourtant, je n’ai aucun mal à parler de celle qui tente de mener ma vie. Et c’est aussi pour cette raison que j’ai débuté ce blog, pour reprendre le dessus. Pour montrer que je peux encore prendre des décisions et des choix pour mener ma barque. Et ce matin, pavé dans la marre. Un ange rejoint le ciel.

Lors de mon diagnostique, j’ai cherché des informations sur internet, pour pouvoir comprendre et appréhender ce qui m’attendait. Ma pathologie touche généralement les personnes autour de la cinquantaine, alors je n’ai pas trouvé de pistes me permettant de m’identifier. J’avais besoin d’un modèle aussi proche en âge de moi, pour savoir comment vivre avec. Je cherchais le mode d’emploi à quelque chose d’inexplicable. Pendant ces recherches, je suis tombée sur cette jeune femme. Je m’étais sentie un peu moins seule. Elle avait à coeur de faire connaître les deux maladies rares dont elle était atteinte afin de faire avancer les recherches inexistantes.

Je ne la connaissais pas personnellement, pourtant, j’ai ressenti du chagrin. Elle a eu recours au suicide assisté, en Belgique. Ce n’est pas anodin comme acte mais je suis heureuse qu’elle ait pu partir sereinement, entourée de ses proches. J’espère que de là où elle est, elle est apaisée.

Constater qu’elle ne s’en est pas sortie indemne m’a fait un électrochoc. J’ai ressenti de la peur, de moi aussi, ne pas y arriver. Elle a été diagnostiquée autour de ces vingts ans et s’en est allée onze années plus tard. Je sais pertinemment que pour chaque malade, c’est une autre maladie. Mais cette nouvelle vient nourrir mes craintes les plus profondes face à mon avenir de malade chronique. Je n’ai jamais eu spécialement peur de mourir, mais cette fois-ci, plus que jamais, je n’ai aucune envie de laisser ma peau si vite. Je lui dédie mes larmes pendant quelques minutes et envoie toutes les plus douces pensées à ceux qui lui sont restés.

Et je reprends mes esprits, pour elle. Comme un hommage, je décide que pour elle et pour tous ceux souffrant dans le silence, je ne dois pas m’arrêter à l’étape de la peur. La peur n’empêche pas le danger. Et je ne peux pas gaspiller ce temps précieux, où je suis encore capable de vivre mille expériences fabuleuses. Je ne peux pas faire ça, rien que par respect pour les autres.

Alors malgré la boule dans ma gorge, je me lève. Je dois me lever et je dois affronter cette vie, peut importe les obstacles.

Et je commence par le yoga, comme chaque matin. Je sèche mes larmes et intérieurement, même si c’est encore le chaos émotionnel, je fais le vide. Je dédie ma séance, chacune de mes inspirations et tous mes gestes à toi, jolie ange. Et aujourd’hui, c’est la dernière séance du voyage avec Adriene. Une aventure qui s’achève, ainsi qu’une vie parmi tant d’autres. Adriene dit que dans chaque fin se trouve un nouveau commencement. Si elle savait comme ces mots raisonnent en moi. La particularité de la séance est qu’elle va pratiquer de son côté, sans donner d’indications à l’oral. Je commence la pratique et sors tous les outils appris jusqu’ici. La musique douce de la vidéo m’accompagne. Par moment, je jette un regard sur l’écran pour me rassurer, elle est toujours là. Puis, je plonge profondément dans mon corps et dans un espace alternatif. Je suis complètement engagée dans ma pratique et je recherche les postures me faisant du bien. Je n’ai pas conscience du temps et je n’en veux pas. En me retrouvant en posture du cadavre, je médite. Et lorsque je sors de cet état introspectif, je m’aperçois que la vidéo s’est terminée. Je ressens une certaine fierté d’avoir pratiquée seule durant une heure. C’était magique, apaisant. Je n’ai pas plus de mots, c’était puissant.

Le reste de la journée, je dédie mon temps à l’écriture, à me nourrir et à prendre le temps de profiter de vivre. Je n’ai pas besoin d’en dire plus car tout ce dont j’aimerais me souvenir réside dans les lignes précédentes. Malgré ces nouvelles bouleversantes, c’est une journée qui mérite d’être vécue et encore plus que toutes les autres.

Jour 71 – Se laisser vivre, c’est peut-être ça le secret

Ce matin, je me réveille avec lenteur. Mes yeux sont ouverts, mon corps se met en mouvement pour sortir du lit et malgré tout cela, je continue à dormir. Pendant quelques heures, je m’accorde le droit d’émerger. C’est le week-end, après tout.

Une fois que je me sens prête à commencer enfin cette journée, je rejoins mon tapis de yoga pour la séance du jour. C’est l’avant dernier jour du calendrier proposé par Adriene. Je suis focalisée sur l’instant et le savoure avec délicatesse.

Après la séance et une douche, je me retrouve en cuisine. Il est déjà l’heure du repas de midi que j’entame mon petit-déjeuner. Les heures n’ont aucune importance.

Cette après-midi, je décide de continuer à coudre. J’enclenche la musique avec laquelle je fredonne et le temps s’écoule.

En fin d’après-midi, je me prépare une soupe et le ventre réchauffé, alors que la luminosité décline, je me rends en balade. Aujourd’hui, il fait gris et il pleut sur la vie. Je choisis de me rendre près du lac, la promenade promet d’être vide vu le temps. Il ne fait pas spécialement froid et l’ambiance désertique m’apaise. L’eau est plutôt calme et les canards flottent à sa surface. Sur mes pas, la nuit tombe. Malgré la froideur des teintes qui m’entoure, cet balade me réchauffe le coeur.

Sur mes pas, la nuit tombe. Malgré la froideur des teintes qui m’entoure, cet balade me réchauffe le coeur. Et lorsque les lampadaires illuminent mes pupilles, il est temps de rentrer.

Après un bon repas, je décide d’écrire. J’ai cette impression d’avoir mille choses à dire. Mille songes qui doivent sortir de ma tête. Je ne ressens pas la fatigue comme si mon corps me donnait la permission d’aller jusqu’au bout de ce que j’ai entamé. Et vient le moment de mettre un point final. Dès ce moment précis, je vais me mettre dans mon lit et aussi soudainement, mon corps se relâche pour me laisser glisser vers le repos.

Je suis heureuse, ce fut une douce et belle journée.

Jour 70 – Météo changeante

Aujourd’hui, la banalité du quotidien me rattrape. J’ai de la lessive à faire et c’est l’activité qui va rythmer ma matinée.

Entre chaque minuterie pour descendre à la buanderie, je m’active. Pendant que la machine tourne, je profite pour avancer de la paperasse, que j’ai repoussé jusqu’à maintenant. Puis, je reprends l’écriture. Je ne cesse d’être coupée par la sonnerie me rappelant d’aller lancer une autre machine. Suspendre le linge est un défi physique, je tente de m’occuper l’esprit par un peu de musique. Et ainsi, la matinée défile, entre écriture et le linge propre.

La satisfaction d’accomplir des choses si simples, me nourrit. La satisfaction d’en être capable.

Je n’ai pas encore pu faire ma séance de yoga et je dois admettre qu’à chaque fois que je croise mon tapis du regard, je ressens un pincement. Ne pas avoir pratiqué dès le réveil me manque.

Lors du repas de midi, la lessive n’est toujours pas finie. J’attends d’avoir pleinement achevé cette corvée pour pouvoir passer à une activité plus récréative.

Dehors, depuis ce matin, les éléments se déchainent. J’ai eu l’occasion de les observer. Il y a eu la brume matinale puis la pluie battante et en continu, le vent balaie l’horizon. Les rafales sont si fortes que j’entends le sifflement continuel. Par moment, le soleil perce les nuages et j’ai même pu apercevoir un morceau de ciel bleu. De courte durée car le vent s’affaire à ne laisser aucune chance à une météo stable. Il règne en maître sur cette journée humide. Au loin, je devine les moutons sur le lac, la mousse blanche produite par les mouvements incessants des vagues. La couleur de l’eau est disparate. Par endroit, elle se veut bleu foncée et à d’autre, elle va du vert gris au vert fougère, intense. Certaines côtes sont brunie. Ce tableau insuffle en moi l’envie d’aller braver le froid.

Lorsque la machine se termine enfin, je suis dans un état approximatif. Je suis heureuse d’être parvenue au bout de ma corvée mais je suis frustrée de m’apercevoir que j’ai des douleurs fracassantes. Elles partent de la pulpe de mes doigts pour atteindre mes épaules et descendre au centre de mon dos. Depuis le réveil, c’est l’escalade douloureuse. J’ai tenté de l’ignorer mais en me rendant sur mon tapis, je suis heureuse d’y arriver mais je suis fâchée d’être dans un état aussi inconfortable que celui-ci. En posant la plante de mes pieds sur le tapis, je suis pessimiste sur mes capacités. Je me dis que la douleurs remplacera le bien-être et que ma séance est déjà gâchée. Et doucement, je m’encre dans la pratique, les postures et ma respiration. Et sans m’en apercevoir, je ne ressens plus rien de négatif. Je suis dans un espace différent. Il est protecteur, bienveillant et puissant. La magie a opéré et je m’en aperçois d’autant plus, lors de ma dernière expiration, avant d’ouvrir les yeux.

Je décide d’aller profiter de prendre l’air. Je m’habille et me lance dans la rue, sans destination précise. Comme d’habitude, la pluie en plus. À la différence que cette fois-ci, je regrette très vite d’être dehors. La douleur reprend plus vivement, ainsi que la fatigue. J’ai l’impression que mon corps entier me tire vivement vers le sol. Comme si la gravité était soudainement plus forte pour moi. Et la frustration revient. Je suis déçue de n’avoir pas pu profiter d’aller dehors lorsque j’avais de l’énergie. Je suis fâchée d’être contrainte de souffrir. Je ne trouve plus l’intérêt d’être dehors. Alors, je fais marche arrière, complètement désemparée par toutes les émotions envahissantes.

Et pendant que mes pensées s’enfonçent plus profondément dans une spirale déprimante de complainte, d’agacement et de déception, quelque chose attire mon oeil. Sur le trottoir mouillé, appuyé contre le poteau, un gros caillou. Il me surprend car d’habitude, il n’y a pas de caillou sur ce trottoir. D’autant plus qu’il est d’une belle taille et je me demande donc comment il est arrivé-là. Plus je m’en approche, plus je m’aperçois qu’il y a autre chose d’étrange. Arrivée à sa hauteur, je marque un arrêt et observe.

Fantastique

Et soudainement, je me mets à penser que c’est un signe de l’univers. Je m’imagine que le destin a décidé de me remonter le moral. Comme si le destin voulait que je n’oublie pas que la vie, malgré tout, c’est fantastique.

Je souris.

Je continue ma route, le coeur plus léger et acceptant de devoir rentrer pour me reposer. Cette fois, je ne suis plus fâchée. Quelques mètres plus loin, je trouve une autre pierre.

Formidable

Je marque encore une fois un arrêt, avec la curiosité de lire le mot. J’ai l’impression de participer par hasard, à un jeu. C’est formidable et je suis émerveillée par la magie de ce moment.

Magique

Et au troisième et dernier caillou que je rencontre, je suis reconnaissante envers la personne qui m’a fait vivre ce moment magique. Je ne pense pas que cette personne ait conscience qu’elle a fait basculer mes émotions et m’a allégé d’un poids. J’avais juste besoin d’un signe pour tout lâcher et pouvoir avancer vers mon bien-être. Alors, même si elle ne le saura jamais, je l’en remercie. Ces trois petits mots, si bien choisis, ont peint un doux sourire sur mon visage. Mais surtout, ces trois grosses pierres, m’ont fait réalisé que j’avais oublié d’apprécier le plus simple. Pendant quelques heures, je m’étais laissée happée par la négativité et je ne savais plus savourer toute la richesse de ma vie.

En rentrant, mes douleurs n’ont pas disparu. Elles sont si vivaces qu’elle me font douter. Comme si c’était pire que d’habitude et qu’au fond, je n’avais jamais vraiment eu mal. Pourtant, je sais que c’est faux. Déterminée à retrouver un peu de bonheur, j’enclenche le diffuseur et choisis un mélange d’huiles essentielles d’orange douce et de lavande. Dans cette ambiance parfumée et apaisante, je prends ma liseuse et m’allonge. Mon corps se relâche et je parviens à faire abstraction des sensations. Calme et réconfortée, c’est ainsi que je vais passer le reste de ma soirée.

Jour 69 – La revanche

Photo de Brett Jordan sur Pexels.com

Je me lève, à l’aube d’un nouveau jour et toutes les possibilités qui vont avec. La première chose qui me vient à l’esprit, c’est que j’ai besoin de me mouvoir, de prendre de l’air frais. Je ne saurais expliquer ce besoin, en sortant du lit. Alors sans chercher à comprendre, je m’habille et vais fouler le bitume. Il est tôt, le jour se lève à peine et dans la rue, les gens s’activent. En faisant le tour du quartier, j’observe toutes ces personnes qui s’empressent d’aller au travail, d’amener leurs enfants à l’école et ainsi de suite. Je savoure cette chance qui m’est donnée de pouvoir vivre auprès de mes besoins et de mes envies.

Je rentre chez moi, légère et prête à consommer mon énergie. Je commence par aller m’installer sur le tapis de yoga. Les pieds bien encrés dans le sol, je fais le vide et regarde en face de moi. Il fait plus clair désormais, par la fenêtre. Une épaisse brume maquille la vue. J’entame mes salutations au soleil, pensant peut-être pouvoir changer cette météo grisâtre. Puis, une fois satisfaite, j’enchaîne avec la séance d’Adriene. C’est une session pleine de douceur.

Aujourd’hui, j’aimerais énormément pouvoir remettre au clair mes écrits des jours passés. Et ainsi, je passe une bonne partie de la matinée à écrire. Je crois pouvoir dire que le chamboulement vécu cette semaine commence à se tasser. Je suis plus sereine avec cet idée de prendre un nouveau traitement, voulant faire ce qu’il y a de mieux pour moi ou en tout cas, essayer. Et l’heure tourne tellement vite pendant que mon esprit est occupé que je m’aperçois au dernier moment, que j’ai une séance avec ma thérapeute. J’enfile mes chaussures et m’y rends le plus rapidement que je le peux.

J’arrive juste à l’heure. La séance se déroule sans encombre.

En rentrant, mon estomac se fait entendre. J’ouvre mon frigo, sans grande inspiration. Je songe à un plat, puis un autre. Je ne suis pas très convaincue jusqu’au moment où me vient une idée alléchante et rapide (en plus!).

Je mange puis, cela fait plusieurs jours que j’aimerais changer un espace de rangement que j’ai dans mon salon. Me sentant pleine d’énergie, j’attaque en suivant mon plan initial. Je sors les tournevis et bricole mon intérieur avec ferveur. Par moment, je me trouve en difficultés et je suis tentée d’abandonner. Je me maudis d’avoir eu cette ambition. Puis, je prends de grandes inspirations et avec les expirations, j’expulse les pensées négatives. Doucement, je parviens à trouver des solutions aux problèmes se présentant. Je suis fière de moi. J’accomplis toutes les petites choses que je délaissais mais qui méritaient d’être faites. Comme pour prendre ma revanche sur les jours précédents, j’en fais le plus possible. En fin de journée, lorsque mon salon ressemble plus ou moins à ce que j’avais imaginé, je ressens la satisfaction d’en avoir été capable, toute seule. Je n’ai eu besoin que de moi-même, de temps et de persévérance.

Le soir, j’enfourne une belle lasagne faite maison et la déguste avec mes proches. Je me sens éreintée mais accomplie. Je m’endors, confiante.

Jour 68 – Lâcher prise

« Parfois, lâcher prise est un acte plus puissant que se défendre ou s’accrocher.  »

— ECKHART TOLLE

Le matin, je commence par ma séance de yoga. En parallèle, des vidéos, je commence aussi à pratiquer sans être guidée, un peu chaque jour afin de m’y habituer et d’apprendre. L’idée de pratiquer seule, sans guide m’a parue de prime abord assez effrayante puis, une fois sur mon tapis. Je me rends compte que simplement en m’accordant l’opportunité de me faire confiance, j’en suis capable. Je sais les mouvements et les enchaînements mieux que je ne le penses. C’est une agréable découverte qui me conforte dans mon choix. Au fond de moi, j’ai le souhait secret (plus si secret désormais) de continuer une pratique quotidienne aussi longtemps que je le pourrais.

Après ce moment de bien-être, j’ai prévu de passer la matinée en cuisine avec ma famille. Nous allons réaliser des raviolis maisons. Au début, l’atelier est un peu brouillon. Le temps que nous trouvions nos places respectives et doucement, une petite usine se met en place. Nos mains s’affairent à plein régime. Dans la cuisine, il règne une ambiance bonne enfant mais productive. Entre deux façonnages de raviolis, une bataille de farine s’invite. C’est un moment léger qui me fait oublier les contraintes de l’activité. Je ressens que la force et la dextérité que j’utilise s’amenuisent rapidement. Je tente de faire bonne figure mais en réalité, à l’intérieur, les sensations sont de plus en plus désagréables. Je tiens le coup jusqu’au moment de la délivrance, passer à table. Ensemble, nous savourons ce plat dans lequel, nous avons glissé beaucoup d’amour.

En début d’après-midi, je rentre chez moi. Je me sens simplement heureuse mais épuisée. Je vais m’allonger car j’ai l’impression que je pourrais dormir. Malheureusement, il n’en est rien. Malgré tout le sable que j’ai dans les yeux, les paupières n’arrivent pas à se fermer définitivement. La fatigue m’angoisse. Je suis heureuse d’avoir pu passer cette belle matinée mais j’avoue qu’aujourd’hui, ça m’ennuie de ne pouvoir profiter que d’une demie journée de vie. J’aurais aimé que mes limites soient plus grandes. Il y a aussi les restes de la veille avec l’appréhension de faire de mauvais choix concernant ma santé. Je n’aime pas décider de choses si importantes. Comment savoir ce qui sera bon pour moi? Personne ne le sait. Je dois continuer de digérer avant de prendre ma décision finale. J’ai besoin de recule. Et je crois qu’au fond, malgré toute la positivité dont je sais faire preuve au quotidien et fasse aux situation difficiles, j’ai parfois le droit de me laisser me morfondre. Ça ne fait pas de moi quelqu’un de moins fort que d’habitude. J’ai simplement besoin de temps pour encaisser, comme tout le monde finalement. Ça ira mieux demain.

Je passe donc l’après-midi, sous le duvet épais. Demie consciente.

En fin de journée, je tente de me motiver pour écrire. Hier, c’était difficile et j’ai à peine noté mes idées.

Je m’aperçois qu’aujourd’hui, ce n’est pas mieux alors je lâche prise. Je m’accorde la possibilité d’être ce que je suis. Je ne suis pas bien. Je suis malade et ça fait parti de mon quotidien. J’admets que j’aurais aimé un peu de répit car lorsque les crises s’enchaînent, la crainte qu’elles ne s’arrêtent jamais s’ajoute. Alors, je lâche prise. Je laisse tomber l’idée d’être bien, de devoir produire quoi que ce soit, je laisse mon esprit aller à toutes les pensées, sans filtre. J’accepte cette situation, car je ne peux rien y changer. Et ainsi, c’est le mieux que je puisse faire pour avancer. Je laisse le poids de tout cet inconfort prendre la place dont il a besoin, pour mieux m’en décharger par la suite.

Ce soir, je suis sur pause et ce n’est pas grave.