Avant de lire ce qui suit, je te propose, si tu ne l’as pas déjà lu, d’aller jeter un oeil aux chapitres précédents.
Chapitre 6 – Le monde bienveillant de la médecine
Chapitre 7 – Ma nouvelle étiquette
Bonne lecture!

Depuis l’annonce officielle de mon syndrome, plusieurs choses ont changé en moi. C’est tellement compliqué à admettre, à assimiler et à expliquer que je ne sais pas comment l’écrire. J’essaie de trouver la formulation idéale qui embellira ce que je ressens. Je vais tenter d’être honnête avec vous, avec moi. Vous êtes le prétexte par lequel je passe pour comprendre et digérer ce que je vis. Ok, bon, il faut que je cesse de tourner autour du pot. Je me lance.
Je me sens vide.
J’ai mis tellement d’énergie pour trouver d’où venaient mes problèmes, de les légitimer et maintenant que c’est posé, je n’ai plus de raisons de me lever. C’est aussi simple et déprimant que ça.
C’est étrange pour moi de vous dire ça. En temps normal, je suis si positive. Depuis le diagnostique, je ressens ce manque d’énergie. À la fois, j’ai envie d’avancer avec ce que je sais désormais et à la fois, je suis coincée. Je ressens que ce quotidien n’est définitivement pas adapté à mes difficultés et pour y remédier, il faut entamer une reconversion professionnelle, il faut des démarches, des financements, du travail et de l’énergie. Et c’est ce dernier point qui m’ennuie. J’ai l’impression que le corps arriverait à suivre mais pas la tête. Elle est fatigué. Le combat l’a achevé. C’est peut-être ça, une dépression. Avant, je n’avais plus la force physique d’accomplir des choses et dès maintenant, c’est la force psychique qu’il me manque. Alors peut-être que crier à la dépression, c’est peut-être un peu rapide. C’est peut-être qu’une passade désagréable de plus.
J’avais un but jusqu’ici. J’avançais avec l’objectif de prendre soin de moi et de trouver des explications à mon état. J’étais indulgente envers mes limites et malgré tout, je ne reculais devant rien. J’entreprenais toujours tout un tas de choses en dépit de mon état. J’ai terminé ma quête et je constate que je n’avais pas préparé l’après.
Après le diagnostique, lorsque ça ne se guérit pas, il reste quoi à faire?
J’ai tourné et retourné la question, consciemment, inconsciemment.
Je crois que je dois trouver une nouvelle raison d’avancer. J’ai besoin d’un nouveau moteur et c’est pas les idées qui viennent à manquer. Actuellement, j’ai toujours la tête pleine de projets mais j’ai l’impression d’être convaincue par aucun d’entre eux. Je n’arrive pas à décider ce qui sera le mieux pour moi. J’ai peur d’échouer. Alors je n’entame rien. Je reste ensuite frustrée de cette inertie.
Et puis j’ai peur de faire les mauvais choix. En choisissant cette profession, je n’avais aucune idée de l’avenir qui m’attendait et pourtant, j’ai la sensation d’avoir failli. Je m’en voudrais presque d’avoir mal choisi et pourtant, j’ai conscience de ne pas être coupable. Mais tout de même, la culpabilité d’avoir fait le mauvais choix me touche.
En dehors de la peur d’échouer, il y a la peur de devoir capituler. Il est aussi possible que je n’ose pas entamer un projet par trouille de devoir l’abandonner à cause de mon état. Finalement, c’est peut-être ça le nœud du problème. Je ne sais pas où sont les nouvelles limites de ce corps. Je ne me connais plus. Je ne me reconnais plus. J’ai mis plus d’une vingtaine d’année à apprendre à me connaître, à savoir que j’avais du potentiel. Et finalement, là, je retourne à mon adolescence. Je retourne aux doutes vis-à-vis de l’avenir. La pression de devoir refaire un choix d’avenir qui soit le bon pour un temps. J’ai conscience que ce que je choisirais professionnellement n’est à nouveau pas pour ma vie entière mais si après si peu d’année de travail, je retourne déjà à la case départ, qu’est-ce qui empêche la vie de me faire tout recommencer dans cinq ou sept ans? Personne n’a de garantie sur la vie et je le sais bien mais actuellement, l’épuisement de la maladie me fait voir la vie et ses épreuves comme une chaîne de montagne inaccessible.
J’ai abandonné avec regrets plusieurs aspects de ma vie, de mes habitudes et de mes plaisirs. Je pense l’avoir accepté que ma vie sera différente. Je suis désormais dans une bulle où je tente de me préserver de nouvelles déceptions. Forcément, je tente d’éviter les coups de bâton. Et finalement cette bulle devient ma prison. Je n’ose pas entreprendre. Je n’ose pas en sortir. Je m’étais pourtant promise de vivre chaque jours en célébrant les petites victoires et les actes réussis tout en fermant les yeux sur le reste. Quand ai-je laissé ce leitmotiv de côté?
J’ai enfin une bonne nouvelle! J’ai pris des jours et des jours à éviter de voir toutes ces peurs en face mais maintenant que j’en ai conscience, sachant que la peur n’évite pas le danger, je me dois d’avancer avec. Avec mes peurs, avec mon syndrome.
Il n’est jamais trop tard. Maintenant que j’ai pu observer mon moral sur la mauvaise pente, il est temps pour moi d’agir. D’entreprendre une vraie célébration à ma jolie vie et m’offrir à nouveau ce plaisir de vivre. Avoir peur, ce n’est vraiment pas habituel pour moi, alors il ne faut pas que ça devienne une habitude. Il me faut des rituels hebdomadaires, du repos lorsque cela est nécessaire et surtout, il faut que je me jette à l’eau! J’adore me baigner, c’est l’occasion rêvée de faire d’une pierre deux coups!
J’en ai toutes les capacités. Il faut que je me le prouve à nouveau. En ayant ce nouveau statut de personne atteinte de sa santé, j’ai l’impression d’avoir moins de valeurs qu’une personne saine. Merci la société et le vocabulaire utilisé autour de ces thématiques. Je dois me lancer dans un projet pour me prouver que je peux le faire, que je peux y arriver et surtout que les capacités sont présentes, c’est juste à moi d’y croire. Elles attendent juste mon aval.
Et c’est ainsi, sur ces mots que j’ai créé le blog sur lequel vous lisez mes péripéties. Pour ceux qui n’aurait pas suivi les débuts de celui-ci, j’ai documenté pendant plus de trois mois, mes journées, mes petites joies quotidiennes. J’ai cultivé le bonheur comme je ne l’avais jamais fait auparavant et ça a véritablement été ma bouée de sauvetage. J’ai osé tout un tas de choses dont je ne me saurais pas cru capable et petit à petit, j’ai appris à vivre avec mon syndrome, avec ses hauts et ses bas. Mais surtout, le plus important, j’ai retrouvé une raison d’avancer. J’ai appris à vivre pour moi.
Fin
Merci encore de me lire, j’espère que ça t’a plu. N’hésite pas à me donner ton avis! Prends soin de toi, c’est important!
Lili